Droits de douane massifs de Trump : quels effets ?

 

Droits de douane massifs de Trump : quels effets ?
Droits de douane massifs de Trump : quels effets ?

 

Ce mercredi 2 avril 2025, Donald Trump a relancé une guerre commerciale à l’échelle mondiale en annonçant des droits de douane massifs sur tous les produits importés dans son pays, c’est-à-dire ceux qui entrent aux États-Unis. Cette décision marque une nouvelle étape majeure dans son approche protectionniste et soulève de nombreuses questions sur les conséquences économiques à venir.

Derrière cette annonce se trouve une stratégie politique claire, celle de renforcer la production nationale et par prolongement l’économie américaine, en limitant les importations, en renforçant les entreprises nationales et en améliorant la balance commerciale. C’est avec cet objectif que Donald Trump a imposé des surtaxes au reste du monde, 20 % par exemple sur les produits européens et 34 % sur ceux en provenance de Chine. Ce choix, loin d’être anodin, s’inscrit dans la continuité de la politique économique de Trump, qui a toujours voulu redonner de la compétitivité aux industries américaines en taxant les autres.

Cette stratégie qu’il a mise en place pour le commerce international va de pair avec sa stratégie intérieure. En effet, Trump veut utiliser l’argent dégagé par cette taxation pour financer les baisses d’impôts instaurées à l’intérieur des États-Unis. Son objectif est de favoriser l’économie américaine, privilégier les entreprises américaines, ramener des emplois sur son territoire, et selon son slogan bien connu, rendre sa grandeur à l’Amérique.

Mais cette offensive protectionniste risque d’avoir de lourdes répercussions pour le commerce mondial. Les nouvelles barrières douanières risquent de perturber les chaînes d’approvisionnement mondiales, d’aggraver les tensions avec les partenaires commerciaux, de chambouler les Bourses, et de ralentir la croissance économique mondiale dans de nombreux pays. La situation pourrait même évoluer en une véritable guerre commerciale avec des conséquences incertaines pour les marchés nationaux et internationaux.

Bien que cette politique puisse paraître avantageuse pour les industries américaines à court terme, elle pourrait se retourner contre les consommateurs américains. L’augmentation des tarifs douaniers risque d’entraîner des hausses de prix sur une multitude de produits, ce qui va réduire le pouvoir d’achat des ménages. Les premières victimes seront donc les consommateurs eux-mêmes, qui devront faire face à une inflation alimentée par ces nouvelles taxes.

Pour la France, cette décision représente un défi majeur. Le pays est un acteur clé du commerce avec les États-Unis, notamment dans les secteurs de l’agroalimentaire, du luxe, et de l’aéronautique. L’imposition de ces droits de douane pourrait affecter directement les exportations françaises, et impacter les entreprises concernées et par ricochet, des milliers d’emplois ici en France. Cela aura donc un impact important sur la croissance française, ce qui va dégrader encore davantage les finances publiques françaises et risque de créer un cercle vicieux négatif pour notre économie.

Face à cette nouvelle menace, l’Union européenne prépare une riposte, bien que des divergences internes existent. Si des pays comme la France militent pour une réponse ferme, d’autres, plus dépendants des exportations vers les États-Unis, comme l’Allemagne et l’Irlande, plaident pour des négociations. Le mois d’avril sera décisif, avec des représailles européennes qui pourraient aggraver la situation, ou au contraire, offrir un chemin vers la négociation.

 

Trump et les droits de douane : une nouvelle vague de protectionnisme

Le 2 avril 2025, le président des États-Unis, Donald Trump, a annoncé une série de mesures tarifaires significatives qui visent la quasi-totalité des importations américaines. Ces mesures comprennent un tarif universel de 10 % sur tous les produits importés, avec des taux plus élevés pour certains partenaires commerciaux. Par exemple, les importations en provenance de l’Union européenne, du Japon et de la Corée du Sud seront soumises à des droits de douane d’au moins 20 %, tandis que celles du Vietnam et de Taïwan seront respectivement taxées à 46 % et à 32 %. ​Celles du Royaume-Uni seront à 10 % et celles de l’Inde à 26 %.

La formule utilisée par Donald Trump et son équipe pour déterminer ces taux reste assez opaque et il est encore difficile de savoir comment ils sont arrivés à de tels chiffres. Le président américain a par exemple plusieurs fois critiqué la TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée) qui est beaucoup plus élevée en Europe qu’aux États-Unis, la présentant comme une forme de protectionnisme. Sauf que cette taxe est une taxe sur la consommation, pas sur la production, ce qui signifie qu’elle est payée par les consommateurs, et cela peu importe si le produit vient de France, des États-Unis ou de Chine.

Le président Trump a justifié ces mesures en déclarant une “urgence nationale” censée pallier la menace sur la sécurité et le mode de vie américain. Il estime que ces droits de douane vont protéger l’économie américaine contre des pratiques commerciales qu’il juge déloyales. Il a même qualifié cette initiative de « Déclaration d’indépendance économique », en affirmant qu’elle allait revitaliser les industries nationales, telles que la sidérurgie et l’automobile, qui, selon lui, ont souffert de pratiques commerciales mondiales inéquitables.​ Donald Trump a aussi affirmé qu’il s’agissait d’une action “réciproque”. En effet, il estime que les alliés et les concurrents des États-Unis abusent des États-Unis, et cela depuis plusieurs décennies, ce qui justifie, selon lui, les mesures qu’il prend.

Selon les données de la Commission européenne, le commerce entre l’Union européenne et les États-Unis de biens et de services a atteint 1 600 milliards d’euros en 2023. L’Union européenne a exporté pour 822,5 milliards d’euros de biens et services vers les États-Unis, tandis qu’elle a importé pour 774,5 milliards d’euros en provenance de l’autre côté de l’Atlantique. L’UE est donc excédentaire, mais de seulement 48 milliards d’euros, loin des 300 milliards d’euros avancés régulièrement par Donald Trump. Si l’Union européenne a un excédent de près de 200 milliards d’euros sur les biens, elle a cependant un déficit sur les services. En 2024, les États-Unis étaient le premier partenaire de l’UE pour les exportations de biens et son deuxième partenaire pour les importations de biens derrière la Chine.

D’une manière plus globale et selon les données annuelles publiées le 5 février 2025 par le département du Commerce américain, le déficit des États-Unis avec le reste du monde a atteint près de 920 milliards de dollars en 2024. Donald Trump s’appuie notamment sur ce chiffre pour justifier ses mesures protectionnistes qui doivent, selon lui, permettre de rééquilibrer la balance commerciale des États-Unis.

Ces nouvelles mesures prises par Trump marquent une intensification significative du protectionnisme américain, avec des droits de douane qui atteignent des niveaux inédits depuis plus d’un siècle. C’est en quelque sorte un retour vers le protectionnisme du début du 20ème et du 19ème siècle. Depuis la Seconde Guerre mondiale en effet, les États-Unis ont progressivement réduit leurs droits de douane, passant d’un protectionnisme affirmé au début du 20ème siècle à une politique largement ouverte.

Un centre de recherche rattaché à l’université Yale, intitulé The Budget Lab, estime que les mesures protectionnistes mises en place par l’administration Trump depuis le début de son deuxième mandat risquent de faire grimper le taux moyen des droits de douane effectif à 32,8 %, un niveau inédit depuis 1872.

L’administration Trump soutient que ces tarifs créeront des emplois aux États-Unis grâce au rapatriement d’entreprises et d’usines sur le sol national.

Cependant, ces actions ont suscité des critiques tant au niveau national, qu’international. Des experts économiques et des partenaires commerciaux des États-Unis ont exprimé des inquiétudes quant au risque d’une guerre commerciale mondiale, à une augmentation des prix pour les consommateurs américains et à une possible récession économique. Les marchés financiers ont déjà réagi négativement, avec une baisse des indices boursiers et une diminution de la confiance des investisseurs. ​La confiance étant clé en économie, ce sont toutes les composantes de celles-ci qui risquent d’être affectées négativement.

 

Une menace pour le commerce mondial

L’annonce par Donald Trump de droits de douane massifs sur quasiment toutes les importations vers les États-Unis a provoqué un choc immédiat dans le paysage économique mondial. Avec un tarif général de 10 %, qui peut atteindre 20 %, voire même plus pour certains pays, cette décision remet frontalement en cause les principes du libre-échange qui ont structuré l’économie mondiale ces dernières décennies, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’impact pourrait être considérable, non seulement pour les partenaires commerciaux des États-Unis, mais aussi pour l’ensemble du système commercial international.

Cette stratégie, qui vise à protéger les industries américaines et à réduire le déficit commercial américain, s’inscrit dans une vision du monde où les intérêts nationaux priment sur le libre-échange. La politique de Trump est également perçue comme une arme diplomatique, qui vise à contraindre d’autres pays à adopter des politiques favorables aux États-Unis. Les droits de douane, en augmentant le coût des produits importés, sont conçus pour rendre les produits nationaux plus compétitifs. Trump espère ainsi encourager la production locale et réindustrialiser les États-Unis. Cependant, cette approche n’est pas sans risques. Les partenaires commerciaux des États-Unis, notamment la Chine, ont déjà réagi en augmentant leurs propres droits de douane, créant un effet domino qui pourrait paralyser le commerce international.

Le premier risque, et non des moindres, est celui d’une nouvelle guerre commerciale à grande échelle. L’Union européenne, la Chine, le Japon et d’autres puissances économiques ont déjà réagi avec inquiétude, évoquant ouvertement des mesures de rétorsion. Dès le vendredi 4 avril, soit à peine quelques jours après les annonces de Trump, la Chine a par exemple annoncé des droits de douane de ripostes de près de 34 % pour tous les produits américains qui entrent dans le pays, soit le même taux que Trump a imposé aux produits chinois.

Si chaque pays répond par de nouveaux droits de douane sur les produits américains, les échanges risquent de se réduire fortement, ce qui va entraîner des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement mondialisées. Or, une grande partie de la production mondiale repose aujourd’hui sur des flux commerciaux fluides et interconnectés, donc bloquer ces échanges, c’est menacer des millions d’emplois dans le monde, des investissements, et la croissance elle-même

Pour fabriquer un téléphone portable par exemple, des pièces qui viennent de nombreux pays différents sont assemblées pour avoir le produit final. Si chacune de ces pièces est fortement taxée, et cela dans plusieurs pays, son coût global va également fortement augmenter, ce qui va coûter cher aux entreprises. Ces dernières vont probablement répercuter une partie du coût sur les prix de vente, ce qui pénalisera aussi les consommateurs. Certains produits deviendront tout simplement trop chers et les consommateurs cesseront d’en acheter, ce qui réduira les échanges entre pays.

Cette politique américaine de hausse tarifaire intervient dans un contexte de ralentissement économique mondial et de tensions déjà présentes entre les pays, ce qui va encore aggraver les incertitudes. Selon l’Organisation mondiale du commerce (OMC), une escalade commerciale pourrait entraîner une baisse significative du commerce international, qui représentait déjà une part moins dynamique de la croissance mondiale depuis la pandémie de Covid-19. Une fragmentation accrue du commerce pourrait également pousser certains pays à former des blocs économiques concurrents, ce qui risque d’affaiblir davantage les règles multilatérales, incarnées notamment par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en question.

Au-delà des tensions entre États, c’est l’ensemble des entreprises tournées vers l’exportation qui risque d’être fragilisé. Une entreprise allemande qui exporte vers les États-Unis verra ses coûts augmenter, tout comme une entreprise coréenne ou italienne. Ces hausses seront soit absorbées par les marges, soit répercutées sur les prix, ce qui pourrait nuire à leur compétitivité. Dans le même temps, les entreprises américaines elles-mêmes sont exposées, puisque beaucoup dépendent de composants importés pour leurs chaînes de production ou ont des usines partout dans le monde. En alourdissant la facture des importations, les mesures de Trump risquent de perturber leur fonctionnement, voire même d’entraîner des fermetures.

Enfin, cette nouvelle vague de protectionnisme remet en question la stabilité des accords commerciaux passés. Des traités comme ceux de l’OMC, entre zones économiques, ou encore les accords bilatéraux pourraient être fragilisés par une attitude américaine de plus en plus unilatérale. Si les États-Unis, première économie mondiale, contournent les règles qu’ils ont contribué à écrire, cela affaiblit tout le système et pourrait inciter d’autres pays à faire de même. Le risque est alors de voir émerger un monde économique fragmenté, où la coopération est remplacée par la confrontation, avec potentiellement des conséquences militaires.

 

Droits de douane massifs de Trump : quels effets ?
Droits de douane massifs de Trump : quels effets ?

 

Les consommateurs américains : les principales victimes ?

Derrière l’argument affiché d’une protection renforcée de l’économie nationale, les nouvelles mesures tarifaires décidées par Donald Trump pourraient bien frapper… les consommateurs américains eux-mêmes. Si l’objectif affiché est de relocaliser des emplois et de renforcer la compétitivité des États-Unis, l’impact immédiat de la hausse généralisée des droits de douane sera toutefois très concret dans le quotidien des ménages.

Effectivement, des tarifs douaniers plus élevés signifient que les biens importés seront plus chers. Or, une part très importante des produits de consommation vendus aux États-Unis, des vêtements aux produits électroniques, en passant par l’ameublement, les jouets, ou encore certains aliments, proviennent de l’étranger. Selon les données de l’U.S. International Trade Commission, environ 45 % des biens de consommation disponibles sur le marché américain sont issus de l’importation. À court terme, les distributeurs seront contraints de répercuter cette hausse des coûts sur les prix de vente, ou de réduire leurs marges. Les ménages, déjà confrontés à une inflation qui peine à refluer, pourraient ainsi voir leur pouvoir d’achat à nouveau amputé.

Les premières estimations fournies par des instituts économiques américains, comme le Peterson Institute for International Economics, indiquent qu’un tarif généralisé de 10 % pourrait coûter en moyenne 1 500 dollars par an à une famille américaine moyenne, et même jusqu’à plus de 4 000 dollars selon certaines études (notamment du Yale Budget Lab) en cas de tarif plus élevé. Et ce chiffre pourrait être encore plus important pour les ménages modestes, qui consacrent une plus grande part de leur budget aux biens de première nécessité, souvent importés à bas coût de pays moins riches.

Un autre effet indirect, mais tout aussi important, concerne l’emploi. Si les hausses tarifaires peuvent, en théorie, protéger certaines industries nationales en difficulté (comme l’acier ou l’automobile), elles risquent aussi d’entraîner des pertes d’emplois dans d’autres secteurs. Les entreprises qui dépendent fortement de composants importés verront leurs coûts exploser, et pourraient être tentées de réduire leurs effectifs ou de geler des investissements. Le secteur de la distribution, par exemple, est particulièrement exposé. De grandes enseignes comme Walmart ou Target ont déjà averti que des droits de douane massifs pourraient désorganiser leurs chaînes d’approvisionnement et freiner leur activité.

Enfin, l’incertitude liée à une éventuelle guerre commerciale, et aux mesures de rétorsion qu’elle pourrait entraîner, pourrait créer un climat économique défavorable pour les consommateurs. Si les exportations américaines sont ciblées en retour, cela pourrait nuire aux revenus agricoles, industriels ou technologiques, et ainsi réduire les perspectives de croissance et affecter indirectement le niveau de vie des ménages américains.

Donald Trump a estimé que les nouveaux droits de douane imposés au reste du monde allaient rapporter chaque année 600 milliards de dollars à l’État, soit 6 000 milliards de dollars sur 10 ans, c’est-à-dire environ 5 550 milliards d’euros. Il compte sur ce montant pour financer les baisses d’impôts massives qu’il a accordées aux entreprises et aux citoyens américains. Néanmoins, des études estiment qu’en raison des conséquences négatives amenées par ces droits de douane et d’une guerre commerciale, ils ne devraient probablement ramener qu’entre 100 et 200 milliards de dollars par an.

Dans ces conditions, les consommateurs modifieront probablement leurs habitudes et réduiront leurs achats de produits importés, ce qui fera mécaniquement baisser les recettes de droits de douane qui ont justement pour but d’encourager la consommation de produits locaux. Mais avec un pouvoir d’achat réduit et des prix plus élevés, les consommateurs américains ne pourront pas acheter autant de produits, ce qui aura une incidence sur l’activité des entreprises et sur la croissance économique.

 

Les conséquences directes pour la France

Les droits de douane massifs annoncés par Donald Trump ne visent pas un pays en particulier. En effet, ils concernent l’ensemble des importations américaines, y compris celles en provenance de l’Union européenne, et donc de la France. Cette stratégie commerciale, qui marque une rupture brutale avec les règles du commerce international, aura des répercussions concrètes pour de nombreux secteurs français, qu’ils soient directement exportateurs vers les États-Unis, ou intégrés dans des chaînes de valeur mondiales.

En 2023, selon les données des Douanes françaises, les États-Unis représentaient l’un des rares pays avec qui la France a un excédent commercial, avec plus de 10 milliards d’euros d’excédent. Les exportations françaises vers le marché américain s’élevaient à plus de 47 milliards d’euros, principalement dans les domaines de l’aéronautique, des produits pharmaceutiques, des cosmétiques, des vins et spiritueux, des produits agroalimentaires, ainsi que du luxe. Ces secteurs sont aujourd’hui exposés à un risque de ralentissement, voire de contraction de leur activité exportatrice, si les nouvelles taxes douanières rendent leurs produits moins compétitifs.

L’industrie du vin, par exemple, pourrait subir un revers important. Déjà ciblée par des hausses tarifaires lors du premier mandat de Trump, elle avait vu ses exportations vers les États-Unis reculer. Une nouvelle vague de droits de douane pourrait à nouveau peser lourdement sur ses débouchés américains. De même, les entreprises du secteur pharmaceutique ou cosmétique, souvent très présentes aux États-Unis, pourraient être pénalisées par la hausse du prix final de leurs produits sur place.

Au-delà des exportations directes, les entreprises françaises insérées dans des chaînes de valeur globales risquent d’être touchées indirectement. Par exemple, des sous-traitants français qui fournissent des composants à des groupes européens exportant eux-mêmes vers les États-Unis pourraient voir la demande se contracter. Cela concerne notamment les secteurs de l’automobile, de la chimie ou encore des technologies de pointe.

À cela s’ajoute un climat d’incertitude qui pourrait décourager les investissements transatlantiques. Les entreprises françaises implantées aux États-Unis ou dépendantes du marché américain pourraient revoir leurs plans de développement et être pénalisées. La Bourse de Paris (incarnée notamment par le CAC 40) par exemple a déjà accusé de lourdes pertes en réaction aux annonces de Donald Trump.

Enfin, les répercussions de cette politique protectionniste pourraient aussi toucher les consommateurs français. Si une guerre commerciale mondiale s’enclenche, les tensions sur les prix, notamment sur les matières premières ou certains biens technologiques, pourraient se répercuter jusqu’au marché européen. L’économie française, bien que diversifiée, reste largement ouverte sur le monde. Ce type de choc extérieur représente un risque réel pour sa croissance et son emploi.

En raison du contexte intérieur et international difficile, la Banque de France a déjà revu à la baisse ses prévisions de croissance économique pour 2025 en prévoyant une hausse de 0,7 % du PIB, plutôt que 0,9 % comme l’anticipe le gouvernement. Des institutions économiques évaluent l’impact des droits de douane américains à approximativement 0,4 % du PIB, voire plus. Si cela se vérifie, alors la croissance économique ne sera plus que de 0,3 % cette année, ou même moins.

Moins de croissance économique signifie moins de création de richesse, moins de revenus pour l’État (à travers les impôts et taxes), plus de dépenses (par exemple pour les allocations chômage ou pour les aides aux entreprises) et donc plus de déficit public (et par prolongement de dette publique). En 2024, la France a déjà eu l’un des pires déficits publics de l’Union européenne à 5,8 % du PIB et s’est engagée à le réduire à 5,4 % cette année. Cet objectif sera inatteignable avec une guerre commerciale et une croissance ralentie. Cela signifie que la dette publique va augmenter encore davantage, ce qui va pénaliser encore plus les finances publiques françaises, puisqu’il faudra payer davantage d’intérêts chaque année. Cela nécessitera des réformes majeures pour réduire le déficit public, ce qui risque de créer des tensions sociales et de peser encore davantage sur l’économie.

Au-delà des finances publiques, une croissance plus faible signifie moins de hausses de salaires, moins de hausse de pouvoir d’achat et donc moins de consommation. Alors que le contexte économique est déjà morose (notamment à cause de la situation politique), tout cela risque de peser sur le climat des affaires en France et sur les performances des entreprises. Il est donc à craindre moins d’investissements de leur part, moins d’embauche, voire même des licenciements. Tous ces éléments combinés risquent de créer un cercle vicieux.

 

Quelle réponse de la France et de l’Union européenne ?

L’annonce par le président américain Donald Trump de l’imposition de droits de douane massifs sur les importations, y compris celles en provenance de l’Union européenne, a suscité des réactions vives et variées au sein des États membres. Face à cette offensive protectionniste, la France, par la voix de son président Emmanuel Macron, a adopté une position particulièrement ferme.​

Emmanuel Macron a qualifié la décision prise par Trump de “brutale et d’infondée” et a suggéré que les entreprises françaises suspendent temporairement leurs investissements aux États-Unis en signe de protestation. Il a aussi incité et vivement souhaité une réponse collective et solidaire de l’Union européenne (UE). Pour répondre à ces droits de douane, il a évoqué la possibilité d’utiliser le mécanisme anti-coercition de l’UE pour riposter, en ciblant plus particulièrement les services numériques américains, dans lesquels l’UE est déficitaire. ​

Emmanuel Macron a précisé que la première série de représailles interviendrait à la mi-avril, en ciblant spécifiquement les taxes déjà instaurées sur l’acier et l’aluminium. Une deuxième série de représailles doit avoir lieu fin avril, selon ses propos, mais sa teneur n’est pas encore connue. La France, ses partenaires européens et l’Union européenne doivent se concerter pour décider de la marche à suivre et de l’ampleur de la réponse.

En effet, l’approche qui consiste à riposter fermement n’est pas unanimement partagée au sein de l’Union. Des pays comme l’Italie, l’Allemagne et l’Irlande, dont les économies sont fortement dépendantes des exportations vers les États-Unis, préconisent une approche plus mesurée. L’Allemagne, en particulier, craint que des représailles ne nuisent davantage à son industrie automobile, déjà sous pression. De son côté, l’Irlande, avec une présence significative de multinationales américaines sur son sol, redoute les conséquences d’une escalade des tensions commerciales. ​Ces divergences internes compliquent l’élaboration d’une réponse unifiée de l’Union européenne.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a exprimé sa préoccupation face à ces mesures, les qualifiant de « coup majeur porté à l’économie mondiale ». Elle a souligné que l’incertitude engendrée pourrait entraîner une montée du protectionnisme, avec des conséquences néfastes pour des millions de personnes à travers le monde. ​

L’Union européenne a beaucoup d’atouts pour tenir face aux mesures de Donald Trump. C’est une zone économique très riche, la plus riche avec les États-Unis et la Chine. C’est un grand marché, avec près de 450 millions de consommateurs, dont une grande partie avec un pouvoir d’achat élevé. Il y a également de nombreuses entreprises de taille mondiale, une épargne abondante et encore beaucoup d’autres atouts.

Pour répondre aux droits de douane de Trump, l’Union européenne (ou la France dans une moindre mesure) pourrait taxer les produits exportés des États-Unis au même niveau, à savoir 20 %. Il s’agirait d’appliquer un principe de réciprocité qui créerait une pression économique et politique aux États-Unis, mais cela risquerait aussi de pénaliser les consommateurs européens et français, en renchérissant les prix des produits venant des États-Unis.

Une autre solution serait de durcir les règles pour les entreprises américaines présentes ici, voire même de délaisser les États-Unis. Cela passerait par exemple par une position plus ferme concernant les sanctions de non-respect des normes européennes. Ce serait en quelque sorte une pression accrue sur les entreprises américaines et une limitation de leur influence en Europe, et donc leur compétitivité. Ces règles peuvent aussi concerner les normes environnementales, en les durcissant notamment.

Pour riposter aux droits de douane, Emmanuel Macron a demandé aux entreprises françaises de ne pas « jouer solo » et de suspendre leurs investissements prévus aux États-Unis le temps d’y voir plus clair. Dans la réalité, c’est plus compliqué que cela, puisque les investissements se font généralement sur une période longue, qui peut aller jusqu’à plusieurs années. Arrêter un projet prévu depuis des années est forcément très compliqué. Par ailleurs, les entreprises vont chercher à assurer leurs propres positions, avant celles des autres, ou même celles d’un pays, ce qui rend cette volonté assez hypothétique.

Peu importe l’époque ou le président, investir aux États-Unis reste un objectif principal pour beaucoup d’entreprises, dans la mesure où c’est le pays le plus riche et puissant du monde, avec une grande économie, un grand marché intérieur, et avec des consommateurs aisés. De plus, investir aux États-Unis sous Trump pour une entreprise française lui offre un avantage compétitif, à savoir celui de ne pas payer de droits de douane pour sa production locale, à l’inverse d’une entreprise frappée par ces nouvelles taxes, dont les produits seront forcément plus chers.

Au-delà des mesures de représailles, une des possibilités serait d’exporter les produits actuellement vendus aux États-Unis vers d’autres zones du monde. Dans la mesure où le commerce avec les États-Unis va être limité, cela peut donner une occasion de diversifier les exportations, notamment vers les pays émergents. L’Inde par exemple a une population de près d’un milliard et demi de personnes, ce qui va en faire un futur géant économique à l’avenir. Le Brésil ou le Nigeria ont aussi des populations importantes et s’enrichissent progressivement, ce qui peuvent les rendre intéressantes pour les entreprises françaises et européennes.

Mais la solution idéale serait de revenir à la situation précédente, à savoir avec des droits de douane réduits ou même inexistants. En imposant ces mesures protectionnistes, Donald Trump a très probablement derrière la tête l’idée de négocier et d’obtenir davantage de choses de ses partenaires commerciaux. En échange d’une baisse des droits de douane américains, il va peut-être réclamer un marché européen plus ouvert pour les entreprises américaines, une modification des valeurs défendues pour qu’elles soient plus conservatrices, ou encore peut-être la participation plus active de l’Union européenne de sa confrontation avec la Chine. 

L’Union européenne devra donc négocier afin de défendre ses intérêts, ses valeurs, et ce en quoi elle croit. Seul l’avenir nous dira de quoi il est fait, comment la situation va évoluer et dans quel sens.

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