Groenland : un eldorado économique ?

 

Groenland : un eldorado économique ?
Groenland : un eldorado économique ?

 

Le Groenland, territoire inconnu, ou alors souvent perçu comme une terre lointaine et glaciale, connaît un intérêt de plus en plus important à l’échelle internationale. Cette immense île, dotée de ressources naturelles abondantes et stratégiques, est située dans une région clé de l’Arctique. C’est pour ces raisons qu’elle se retrouve au centre des préoccupations économiques, climatiques et géopolitiques. Et sur ce sujet, le plus tonitruant n’est nul autre que Donald Trump, le Président américain nouvellement élu. Il souhaite que le Groenland devienne américain et il est prêt pour cela à l’acheter, l’annexer, ou peut-être même le prendre par la force. À l’heure où les enjeux environnementaux redéfinissent les priorités mondiales, et où les tensions mondiales entre les grandes puissances s’accroissent, le Groenland apparaît comme une terre d’opportunités, voire même de véritable eldorado économique, mais aussi de défis complexes.

Le sous-sol groenlandais regorge de ressources naturelles essentielles, notamment des terres rares et des métaux critiques qui sont indispensables aux technologies modernes et à la transition énergétique. Ces richesses attirent forcément les convoitises, mais leur exploitation pose aussi des questions environnementales et stratégiques majeures

Par ailleurs, avec la fonte accélérée des glaces, l’Arctique devient une zone stratégiquede nouvelles routes maritimes se dessinent, ce qui est en train de redéfinir les échanges commerciaux mondiaux. Cette transformation amplifie l’importance géopolitique du Groenland, qui suscite l’intérêt des grandes puissances, comme les États-Unis, mais également la Chine et la Russie, chacune voyant dans l’île un levier pour ses ambitions économiques et stratégiques.

La France elle-même n’est pas en reste. Malgré son éloignement, elle s’implique activement dans les enjeux groenlandais, qu’il s’agisse de sécuriser des approvisionnements en ressources naturelles ou de contribuer aux débats sur la préservation environnementale dans l’Arctique. L’attention portée par Paris à cette région souligne l’impact mondial des transformations en cours dans cette partie du globe. C’est dans ce cadre que la France a notamment adopté une « Stratégie nationale pour l’Arctique » en 2022 pour définir la stratégie qu’elle doit adopter pour cette partie du monde.

Ainsi, le Groenland se trouve à la croisée des chemins. À la fois victime du réchauffement climatique, mais aussi acteur potentiel de la transition économique mondiale, l’île incarne les promesses et les dilemmes de la reconfiguration géostratégique du monde et du développement durable. Cette région reste malgré tout d’une grande fragilité, facteur dont il faudra tenir compte à l’avenir. Grâce à ses nombreux atouts, le Groenland est en train de devenir un eldorado économique. Les décisions prises à l’avenir par tous les agents économiques concernés conforteront, ou pas, cette situation.

 

Présentation du Groenland et situation actuelle

Le Groenland est une immense île, la plus grande du monde, située au Nord de l’Atlantique. Elle est souvent perçue comme une terre lointaine, inconnue et glaciale, parce qu’elle est couverte à près de 80 % par une calotte glaciaire. Pourtant, le Groenland est bien plus qu’un désert blanc. En effet, cette région autonome rattachée au Danemark, avec une population de presque 57 000 habitants, dispose d’une richesse naturelle et géographique unique qui attire de plus en plus l’attention à l’échelle internationale.

Le Groenland est réparti sur un peu moins de 2,2 millions de km², ce qui, au vu de sa population, représente la plus faible densité de population au monde. Même si d’un point de vue géographique le Groenland est plus proche du continent américain, il est en réalité plus proche de l’Europe d’un point de vue culturel.

Durant le 18ème siècle, l’île a été colonisée par le Danemark, même si une distance de près de 3000 km sépare les deux territoires. Toujours aujourd’hui, le Groenland doit un cinquième de son PIB annuel (environ 20 %), sous la forme de subventions versée par le Danemark. L’autre pilier de l’économie locale est la pêche, sachant que ce secteur représente une très grande majorité des exportations.

Depuis la fin du statut colonial, en 1953, les Groenlandais se sont progressivement émancipés grâce au référendum. En effet, il y a d’abord eu l’autonomie interne en 1979, puis la sortie de la Communauté économique européenne (CEE) en 1982, et enfin l’autonomie renforcée, le contrôle des ressources naturelles et le droit à l’autodétermination en 2009. Concrètement autonome depuis 1979, le Groenland a son drapeau, sa langue et ses propres institutions. En revanche, la politique monétaire, la politique étrangère et la défense dépendent toujours du Danemark.

Sur le plan politique, le Groenland jouit d’une autonomie renforcée depuis 2009, ce qui lui permet de gérer ses ressources naturelles, sa pêche, son environnement, mais aussi sa police ou sa justice. Cependant, les questions de souveraineté et les liens économiques avec le Danemark restent au cœur de son développement. Le gouvernement local aspire à diversifier l’économie de l’île, longtemps dominée par la pêche, son principal secteur d’exportation.

En matière de ressources naturelles, le Groenland se trouve à un carrefour stratégique. Avec le réchauffement climatique, la fonte des glaces ouvre progressivement des perspectives d’exploitation de minerais précieux tels que l’uranium, le zinc, l’or, et même les terres rares. De plus, les hydrocarbures potentiellement présents sous les eaux territoriales suscitent un intérêt croissant, bien que leur extraction soit encore limitée par des contraintes économiques et environnementales.

Néanmoins, ces opportunités s’accompagnent de défis importants. Le coût élevé des infrastructures, la fragilité de l’écosystème local, les coûts de transport et la nécessité d’une gestion durable de ces ressources posent des questions cruciales pour l’avenir. Le Groenland, bien que riche en potentiel, reste une économie largement dépendante des subventions danoises, et de secteurs primaires, comme celui de la pêche.

 

Le sous-sol du Groenland regorge de ressources naturelles essentielles

Le Groenland est souvent décrit comme une terre de glace et de roche, mais son sous-sol recèle des trésors encore largement inexploités. Depuis plusieurs années, les scientifiques et les entreprises minières se tournent vers cette île pour ses ressources naturelles d’une importance stratégique. En effet, les sols groenlandais abritent une variété de minerais essentiels pour les industries modernes, ce qui confère à l’île un rôle potentiel clé dans l’économie mondiale de demain.

Parmi les ressources les plus convoitées se trouvent les terres rares, un groupe de 17 éléments chimiques indispensables à la fabrication de technologies de pointe et généralement liées au changement climatique. En effet, utilisées dans les batteries électriques, les éoliennes ou encore les équipements électroniques, ces ressources sont devenues un enjeu crucial dans la transition énergétique et technologique. Or, le Groenland possède certaines des réserves les plus prometteuses au monde, ce qui attire l’attention des investisseurs internationaux, notamment de la part des Occidentaux, pour faire face à la domination chinoise sur ce marché. Cette dernière représente en effet 60 % de l’extraction mondiale et plus de 90 % de la vente de produits raffinés.

Outre les terres rares, l’île est également riche en métaux tels que le zinc, le fer, le plomb, l’or, le platine, l’uranium et le nickel. Ces matériaux, essentiels à de nombreux secteurs industriels, pourraient transformer le Groenland en un acteur majeur de l’extraction minière. Ces minerais, précieux ou stratégiques, pourraient renforcer l’économie locale tout en jouant un rôle clé dans les chaînes d’approvisionnement mondiales et aider les pays occidentaux à réduire leur dépendance à la Chine.

Cependant, l’exploitation de ces ressources ne se limite pas à une simple opportunité économique. Elle pose des questions majeures en matière d’écologie et de souveraineté. Les projets miniers, souvent situés dans des zones reculées et écologiquement sensibles, risquent de perturber un écosystème unique et déjà fragilisé par le réchauffement climatique. De plus, les décisions concernant l’extraction sont parfois source de tensions entre le gouvernement local groenlandais, la population locale et leurs partenaires internationaux.

 

Le Groenland est-il un futur acteur majeur du changement climatique ?

Le Groenland, par sa situation géographique et ses caractéristiques uniques, occupe une place de plus en plus importante dans les dynamiques globales liées au changement climatique. En tant que région arctique, l’île est à la fois une victime directe de ce phénomène et un acteur dont l’évolution pourrait avoir des répercussions à l’échelle mondiale. En effet, la fonte de sa calotte glaciaire, l’ouverture de nouvelles routes maritimes et l’exploitation de ses ressources naturelles en font un laboratoire grandeur nature des transformations climatiques.

La calotte glaciaire groenlandaise, qui contient environ 8 % de l’eau douce mondiale (soit un douzième), joue un rôle essentiel dans la régulation du climat. Or, les études montrent qu’elle fond à un rythme alarmant, ce qui contribue de manière significative à élever le niveau des mers. Le Groenland contribue à lui tout seul à hauteur de 17 % de l’élévation du niveau des mers. Selon certains scientifiques, si toute la glace venait à fondre, le niveau des océans pourrait monter de plusieurs mètres, ce qui affecterait potentiellement les millions de personnes qui vivent dans des zones côtières. Cette situation fait du Groenland un acteur majeur en ce qui concerne les discussions sur les politiques climatiques au niveau international.

Paradoxalement, le réchauffement climatique offre aussi au Groenland des opportunités économiques inédites. La fonte des glaces rend accessibles des zones jusqu’ici impraticables, ce qui ouvre la voie à l’exploitation de minerais et de gisements pétroliers sous-marins. De plus, la disparition progressive des glaces dans la mer va favoriser à terme l’ouverture de nouvelles routes maritimes dans l’Arctique, ce qui va permettre de réduire les distances entre l’Europe, l’Asie et l’Amérique du Nord, source de gains économiques importants. Ces changements pourraient générer des revenus substantiels pour l’économie groenlandaise et pour le monde entier.

Par ailleurs, le Groenland se trouve dans une position stratégique au sein des débats géopolitiques sur le climat. Les décisions prises par ses autorités, qu’il s’agisse de promouvoir ou de limiter certaines activités économiques, auront ensuite des conséquences sur le reste du monde.

Le Groenland est en train de devenir bien plus qu’un simple spectateur du changement climatique. Il est un acteur dont le rôle ne cessera de croître dans les années à venir, à la croisée des intérêts économiques, environnementaux et géopolitiques. Sa capacité à équilibrer ces dynamiques contradictoires va déterminer non seulement son avenir, mais aussi celui de la planète entière.

 

Avec la fonte des glaces, l’Arctique devient une zone stratégique majeure

La fonte accélérée des glaces dans l’Arctique est l’un des symptômes les plus visibles du réchauffement climatique, mais elle engendre également une transformation géopolitique majeure. Alors que les glaciers reculent et que la banquise s’amenuise, de nouvelles routes maritimes s’ouvrent dans l’océan Arctique, faisant de cette région une zone stratégique cruciale pour le commerce international. Le Groenland, de par sa position géographique, se retrouve au cœur de cette reconfiguration mondiale.

D’après une étude en 2019 dans la revue de l’Académie nationale des sciences des États-Unis (PNAS), le Groenland a perdu 280 milliards de tonnes par an dans les années 2010, contre environ 40 milliards de tonnes de glace par an dans les années 1970, soit une accélération de la fonte par sept.

Dans cette nouvelle configuration, deux voies navigables émergent comme des alternatives potentielles aux routes traditionnelles. D’une part le passage du Nord-Ouest, longeant l’archipel canadien, mais assez sinueux, et d’autre part la route maritime du Nord-Est, le long des côtes russes, la plus prometteuse. Cette dernière route est celle qui représente le plus grand potentiel pour réduire les distances entre l’Europe et l’Asie, puisqu’elle permettra des économies de coûts de transport par rapport aux routes qui empruntent le canal de Suez et le canal de Panama. Les estimations prévoient 30 % de gain de distances (et donc de temps) entre les ports chinois et les ports européens et également 30 % de gain de coûts d’exploitation et de frais de carburant.

Pour les différents acteurs économiques, cette nouvelle accessibilité représente une opportunité majeure. Les navires marchands pourraient transporter des marchandises plus rapidement et à moindre coût, tout en évitant certains des goulets d’étranglement actuels, comme le canal de Suez. Les industries de transport maritime et les pays voisins, notamment la Russie, le Canada, et donc potentiellement le Groenland, se positionnent pour bénéficier de ces changements. Le Groenland, avec sa proximité immédiate des routes potentielles, pourrait devenir une plaque tournante pour le commerce arctique s’il développe des infrastructures portuaires et des services logistiques adéquats.

Cependant, cette nouvelle dynamique n’est pas sans conséquences. La navigation dans ces eaux demeure périlleuse, à cause des conditions climatiques extrêmes (malgré le réchauffement climatique), de la présence de blocs de glace qui dérivent et des rapports parfois conflictuels entre les pays dans cette zone. De plus, l’augmentation du trafic maritime dans cette zone soulève des préoccupations environnementales. L’Arctique est l’un des écosystèmes les plus fragiles au monde, et une intensification des activités humaines, qu’il s’agisse de la navigation ou de l’extraction de ressources, pourrait avoir des répercussions importantes sur sa biodiversité.

D’un point de vue géopolitique, l’Arctique devient également un terrain de compétition entre les grandes puissances mondiales. La fonte des glaces ravive les rivalités pour le contrôle des eaux territoriales et des ressources sous-marines. Des acteurs comme les États-Unis, la Russie, l’Union européenne et la Chine multiplient les investissements et les revendications dans cette région. Le Groenland, bien que politiquement lié au Danemark, se trouve dans une position délicate, puisqu’il doit jongler avec des revendications et des intérêts parfois contradictoires.

 

Le Groenland suscite la convoitise de toutes les grandes puissances mondiales

À première vue isolé et peu peuplé, le Groenland est devenu un point central des ambitions géopolitiques et économiques des grandes puissances mondiales. Cette immense île, riche en ressources naturelles et située au cœur de l’Arctique, offre des opportunités stratégiques majeures dans un contexte de changement climatique et de bouleversements économiques et géopolitiques. Les États-Unis, la Chine, la Russie, et même l’Union européenne voient en elle un territoire clé pour leurs intérêts, qu’ils soient liés aux ressources, à la sécurité ou à l’influence régionale.

Pour les États-Unis, le Groenland est un territoire stratégique incontournable. Depuis la Seconde Guerre mondiale, les Américains disposent d’une base militaire à Thulé, dans le Nord-Ouest de l’île, utilisée pour des opérations de surveillance et de défense dans l’Arctique. La position géographique du Groenland, entre l’Amérique du Nord et l’Europe, en fait un point d’appui essentiel pour contrôler les voies maritimes et pour protéger les intérêts occidentaux dans une région où les tensions augmentent. En 2019, l’offre controversée de Donald Trump de racheter le Groenland au Danemark avait mis en lumière l’importance stratégique de l’île dans la vision américaine de l’Arctique, et plus particulièrement dans la vision qu’a Trump pour cette zone du monde.

À nouveau en ce début d’année 2025 et à moins de deux semaines de prêter serment pour son deuxième mandat, le milliardaire républicain a répété ces derniers jours ses ambitions sur le Groenland, en refusant cette fois-ci d’écarter une éventuelle action économique ou même une annexion par la force s’il le jugeait nécessaire. Il a par exemple menacé d’imposer au Danemark des “droits de douane très élevés” selon ses termes, s’il ne renonçait pas à ce territoire, et cela, dans le but qu’il devienne américain.

Cet intérêt américain pour le Groenland n’a pas été que l’apanage de Donald Trump. Bien avant lui et à plusieurs reprises, les États-Unis ont souhaité acquérir ce territoire en faisant des propositions d’achat, toutes refusées. Déjà en 1867, le Président Andrew Johnson avait voulu acquérir le territoire après le rachat de l’Alaska à la Russie. Puis à nouveau en 1946, le Président Harry Truman avait fait une offre d’achat de 100 millions de dollars en lingots d’or au Danemark, qui l’avait refusée. Encore aujourd’hui, le Danemark maintient et affirme que ce territoire n’est pas à vendre.

Dans la course à l’exploitation des vastes ressources souterraines de l’Arctique, la Russie et la Chine ont pris de l’avance sur les Américains. En effet, d’après le cabinet de conseil financier Guggenheim Partners, des centaines de projets d’infrastructures qui représentant des centaines de milliards de dollars d’investissements sont en train de voir le jour dans cet océan. La Russie par exemple a déjà prévu 186 milliards de dollars d’investissements, contre un peu plus de 100 pour les États-Unis. La société pétrolière russe Rosneft a débuté le forage sur un champ dont le potentiel est estimé à un demi-milliard de barils de pétrole et Gazprom extrait d’ores et déjà de grandes quantités de gaz en mer de Petchora.

De son côté, la Chine a également manifesté un intérêt croissant pour le Groenland, se déclarant même “puissance presque arctique”. En effet, elle considère l’île comme un maillon déterminant de sa « Route polaire de la soie » (en référence aux Nouvelles routes de la soie), dont l’objectif est d’intégrer l’Arctique dans son réseau commercial mondial. Les investissements chinois dans les projets miniers au Groenland, notamment pour l’extraction des terres rares, témoignent de l’intérêt stratégique de la Chine pour diversifier son approvisionnement en matières premières essentielles, malgré le fait qu’elle en contrôle déjà l’approvisionnement mondial. Cependant, ses ambitions sont perçues avec méfiance par les Occidentaux, qui redoutent une influence chinoise croissante dans une région aussi stratégique.

La Russie, même si elle est directement moins impliquée, surveille attentivement l’évolution de la situation. En tant que puissance dominante dans l’Arctique, elle voit le Groenland comme un des éléments essentiels pour le contrôle plus étendu de la région. De plus, les routes maritimes qui s’ouvrent en raison de la fonte des glaces, redéfinissent les équilibres géopolitiques, ce qui pourrait profiter à la Russie.

Enfin, l’Union européenne (UE) et le Danemark, dont le Groenland est un territoire autonome, cherchent à maintenir une influence sur l’île tout en soutenant ses aspirations à une plus grande indépendance économique. L’UE, consciente de l’importance des ressources naturelles du Groenland, explore des partenariats pour sécuriser ses approvisionnements en métaux critiques nécessaires à la transition énergétique et pour se départir de sa dépendance à la Chine. Parmi les 34 matériaux critiques recherchés par l’Union européenne, 25 se trouvent au Groenland et en très grande quantité. Il s’agit de terres rares et de métaux essentiels à la transition écologique européenne, ce qui en fait directement un sujet de souveraineté pour l’ensemble des pays membres.

 

La France aussi est concernée par la situation du Groenland

Bien que la France ne soit pas un pays arctique à proprement parler, elle joue un rôle actif dans les débats et les dynamiques liées à cette région, y compris donc au Groenland. En tant que puissance mondiale dotée d’une présence maritime significative et d’une tradition d’exploration polaire, la France s’intéresse aux enjeux environnementaux, économiques et stratégiques de cette île située au cœur de l’Arctique.

Au cours des trois derniers siècles, la France s’est affirmée comme une nation polaire, ce qui lui a procuré une tradition d’exploration et d’expédition. Cela l’a amené à avoir une présence scientifique permanente en Arctique et en Antarctique. L’ensemble des infrastructures terrestres et des moyens logistiques français dans les zones polaires est géré par l’Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV), qui est une agence de moyens et de compétences au service de la science. Par ailleurs, la France a un statut d’observateur au conseil de l’Arctique depuis l’an 2000.

En 2022, la Stratégie polaire de la France à horizon 2030 a été établie afin de définir les missions de notre pays dans cette zone du monde. C’est à ce moment-là que la France a publié une « Stratégie nationale pour l’Arctique », dont le but est d’éclairer les orientations claires pour préserver les équilibres régionaux et pour soutenir les activités durables.

Sur le plan environnemental, la France est très impliquée dans la lutte contre le changement climatique, un enjeu fortement lié au Groenland, qui en est au premier plan. La fonte rapide de la calotte glaciaire et son impact sur l’élévation du niveau des mers préoccupent directement les autorités françaises, notamment en raison des risques accrus pour les zones côtières françaises, comme en Outre-mer. Par ailleurs, les chercheurs français participent activement à des études sur la région, en collaboration avec d’autres nations, pour mieux comprendre les mécanismes de la fonte des glaces et ses implications globales.

D’un point de vue économique, le Groenland suscite l’intérêt de la France pour ses ressources naturelles stratégiques, notamment les terres rares. Ces éléments essentiels à la transition énergétique sont indispensables pour des secteurs clés comme la fabrication de batteries électriques, d’éoliennes ou de technologies numériques. La France, tout comme l’Union européenne d’ailleurs, cherche à réduire sa dépendance vis-à-vis de la Chine, qui domine actuellement l’exploitation et le raffinage de ces ressources. Nouer des partenariats avec le Groenland pourrait ainsi renforcer la sécurité des approvisionnements français et européens en minerais critiques.

Enfin, sur le plan géopolitique, la France s’inscrit dans une stratégie plus large de l’Union européenne qui cherche à renforcer sa présence dans l’Arctique.

Les relations entre le Groenland et l’Union européenne remontent aux années 1970, durant lesquelles le Groenland est devenu beaucoup plus autonome du Danemark et a pu s’exprimer sur ce qu’il voulait réellement. 

Malgré sa décision de quitter la CEE en 1985, le Groenland a maintenu des relations diplomatiques assez étroites avec cette organisation et ensuite avec l’Union européenne qui lui a succédé

Aujourd’hui, le Groenland est le seul territoire danois présent dans la liste des pays et territoires d’outre-mer (PTOM) associés à l’Union européenne. Ce sont des dépendances et territoires d’outre-mer des États membres de l’Union européenne, mais qui ne font toutefois pas partie intégrante de l’Union européenne elle-même. Cependant, le Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères français Jean-Noël Barrot a déclaré ce 8 janvier 2025 que le Groenland, en tant que territoire autonome appartenant au Danemark, est un territoire de l’Union européenne, et par conséquent, qu’il est à l’intérieur des frontières souveraines européennes.

De son côté, la porte-parole de la Commission européenne Paula Pinho a affirmé que l’article 42.7 du Traité de Lisbonne, qui prévoit une clause de défense mutuelle entre les États membres de l’UE, s’appliquait bien au Groenland. Tous ces éléments signifient que si les États-Unis de Donald Trump voulaient prendre ce territoire par la force, l’Union européenne réagirait et utiliserait aussi la force si cela était nécessaire. La France étant l’une des principales puissances militaires de l’UE, elle serait alors directement concernée.

Cette implication française dans les affaires groenlandaises traduit une volonté de garder son destin en main et d’assurer sa place dans les débats internationaux sur les grandes transformations à venir. Bien que l’Arctique et le Groenland puissent sembler éloignés, les décisions prises dans cette région auront des répercussions directes sur les priorités françaises en matière de climat, de sécurité et d’économie.

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