Informations principales
Johan Gustaf Knut Wicksell est un économiste suédois, né le 20 décembre 1851 à Stockholm, en Suède et mort le 3 mai 1926 dans le même pays, à Stocksund.
Il est essentiellement connu pour sa théorie monétaire, qui a fait de lui l’un des fondateurs de la macroéconomie moderne. Il a également réalisé d’importants travaux concernant les taux d’intérêt nominaux et réels, la productivité marginale du capital et les facteurs qui déterminent le niveau des prix.
Son œuvre a eu un réel impact sur le développement de la théorie néoclassique, même si ses idées se situent plutôt à gauche sur l’échiquier politique et idéologique de la Suède de son époque. De plus, il a véritablement influencé l’école autrichienne d’économie et notamment Friedrich Hayek et Ludwig von Mises, ainsi que l’économiste britannique John Maynard Keynes.
L’un de ses ouvrages les plus importants est l’essai qu’il a écrit en 1896, intitulé Un nouveau principe de juste fiscalité. Knut Wicksell y développe son principe selon lequel les seules dépenses publiques et taxes qui peuvent être considérées comme justifiables sont celles qui ont été approuvées à l’unanimité par le contribuable. Selon lui, le but est d’avoir un système juste et efficace dans lequel ceux qui contribuent aux coûts d’une activité servent également leurs intérêts.
La même année, en 1896, il a publié un autre ouvrage important intitulé Études sur la théorie des finances publiques, dans lequel il applique l’analyse marginaliste à la fiscalité et à la tarification des biens publics.
Par ailleurs, toute sa vie, il a dénoncé l’égoïsme, la cupidité et l’incessante volonté de pouvoir de la part des riches.
Il a également critiqué le marxisme en estimant toutefois que l’avènement d’un socialisme qu’il souhaitait démocratique était inéluctable.
Les organisations syndicales, ouvrières et politiques, mais également les anarchistes le considéraient comme un de leurs alliés. D’ailleurs, afin de protester contre la condamnation d’un jeune anarchiste pour blasphème, il a décidé de faire une satire de l’Immaculée Conception intitulée « Le trône, l’autel, l’épée et le sac d’argent« . Cette satire lui coûtera deux mois de prison.
Enfin, sur la lignée de Thomas Malthus, il a défendu la contraception, et même l’avortement.
Knut Wicksell : à la fois libre penseur radical et anticlérical
Knut Wicksell a vivement exprimé toute sa vie ses idées dans de nombreux articles de journaux et dans des conférences publiques. Il a abordé entre autres les sujets du mariage, de la surpopulation, de la prostitution, de la religion, du socialisme, de l’euthanasie, de la liberté de la presse ou encore de l’alcoolisme.
Après avoir été très croyant durant sa jeunesse, il évolue à 23 ans pour devenir un libre penseur, à la fois radical et anticlérical. Sur la lignée de John Stuart Mill qu’il admirait, il a acquis des convictions féministes et a rejeté la morale judéo-chrétienne, ainsi que les conventions bourgeoises. Wicksell considérait que chaque individu devait avoir le droit de vivre comme il l’entendait. C’est à ce titre qu’il se méfiait du système d’enseignement public, qu’il jugeait trop conservateur et religieux et qu’il s’est occupé lui-même de l’éducation de ses enfants.
De plus, il a ardemment défendu la liberté de parole et le suffrage universel. C’est pour cela qu’il était un antimonarchiste convaincu, ce qui a retardé sa nomination comme professeur permanent. Il a, en effet, refusé de terminer une requête destinée au roi par la formule obligatoire de “votre serviteur obéissant”. Il était par ailleurs craint et très peu apprécié par la plupart de ses collègues.
Au-delà de ces positions, il était également antimilitariste. Il a créé le scandale en suggérant l’idée que la Suède se désarme, afin de s’allier avec la Russie.
La synthèse marginaliste
La “Révolution marginaliste” comme elle est appelée est le mouvement qui a profondément transformé l’économie dans les années 1870. Elle a été initiée par les économistes William Stanley en Angleterre, Léon Walras en Suisse et Carl Menger en Autriche. C’est cette transformation de l’économie qui a donné naissance à l’économie néoclassique, qui est alors devenue le nouveau courant économique dominant. Toutefois, ce courant n’est pas homogène et connaît plusieurs tendances.
C’est là qu’intervient Knut Wicksell, dont un de ses apports les plus importants a été de fusionner ces différentes tendances, après les avoir minutieusement étudiées, ainsi que leurs auteurs. C’est grâce à cela qu’il intègre dans un même modèle, à la fois la théorie du capital, la théorie de l’intérêt de Böhm-Bawerk, le modèle de l’équilibre général de Walras et l’approche anglaise de Marshall et de Jevons.
En plus de cette synthèse qu’il a réalisée, il ajoute sa propre participation à travers le développement de la théorie de la productivité marginale. Celle-ci concerne l’augmentation de la production associée à la dernière unité utilisée d’un facteur de production. La théorie de la productivité marginale complète la théorie de l’utilité marginale, qui concerne l’augmentation d’utilité engendrée par la consommation de la dernière unité d’un bien. Knut Wicksell atteste que, si les facteurs de production perçoivent un revenu qui est égal à leur productivité marginale, alors la totalité de la production est répartie entre tous les facteurs.
Pour lui, cela ne signifie pas non plus que cette répartition est juste et, d’une manière plus générale, que la libre concurrence permet de procurer le maximum de bien-être possible pour la collectivité. Wicksell est, à l’inverse, convaincu par le fait que le capitalisme est un système inefficace qui génère des inégalités. Selon lui, en l’absence d’une transformation en régime socialiste, c’est le rôle des pouvoirs publics de corriger ces inégalités. Dans son ouvrage Études sur la théorie des finances publiques, publié en 1896, il applique l’analyse marginaliste à la fiscalité et à la tarification des biens publics. Il soutient notamment une réduction des taxes indirectes pour les remplacer par un impôt progressif sur le revenu, ce qui doit permettre de redistribuer l’argent des riches vers les pauvres. Cela signifie donc pour lui que l’analyse néoclassique n’est pas nécessairement liée à l’adhésion au libéralisme économique.
La monnaie et les comportements des agents économiques, sujets développés par Knut Wicksell
Les contributions les plus importantes de Knut Wicksell se situent dans le domaine macroéconomique. En effet, il n’est pas satisfait de la façon dont la monnaie et le temps sont intégrés dans l’analyse économique par les auteurs, autant classiques, que néoclassiques. Il rejette plus particulièrement la théorie quantitative de la monnaie qui fait un lien direct entre la masse monétaire et le niveau général des prix, ce qui aboutit à la conclusion que la monnaie est neutre. Selon lui, une économie basée sur le crédit ne fonctionne pas de la même manière qu’une économie monétaire simple, et encore moins qu’une économie basée sur le troc.
Par ailleurs, à l’opposé de la loi des débouchés de Jean-Baptiste Say, il considère qu’il est possible que la demande monétaire globale soit inférieure à l’offre de marchandises.
Enfin, il estime que les décisions d’épargner et d’investir sont prises par des agents économiques différents, et pour des raisons différentes, ce qui signifie que rien ne permet de garantir l’égalité, à un moment donné, de l’épargne et de l’investissement.
Deux taux d’intérêt avec la stabilité des prix pour objectif
À la base de son raisonnement, Knut Wicksell distingue deux taux d’intérêt. En effet, il y a, d’une part, le taux naturel, qui est déterminé par des facteurs réels, notamment les coûts de production et la productivité du capital. Lorsque l’offre d’épargne est équivalente à la demande de capital, cela correspond à ce taux, ce qui implique qu’il ne modifie pas les prix sur le marché des biens et des services. Il ne crée donc pas d’inflation, dans la mesure où il équilibre l’offre et la demande.
Il y a, d’autre part, le taux de marché (ou taux monétaire) observé sur le marché des capitaux. Ce taux peut donc être modifié par l'action de la banque centrale et par les banques qui peuvent émettre des prêts et donc créer sans limite de la monnaie.
Selon Wicksell, rien ne permet de garantir qu’il y ait une égalité entre ces deux taux, ce qui est pourtant la condition de l’équilibre macroéconomique. En effet, un taux de marché qui est inférieur au taux naturel va entraîner une hausse de l’investissement au-delà de l’épargne, et donc une hausse des prix (c’est-à-dire de l’inflation). À l’inverse, un taux de marché qui est supérieur au taux réel va avoir un effet inverse et entraîner une dépression, une baisse des prix (c’est-à-dire une déflation) et du chômage. Selon Knut Wicksell, un système monétaire rationnel devrait avoir pour objectif de contrôler le taux de marché pour faire en sorte qu’il coïncide avec le taux naturel. Le but étant d’obtenir la stabilité des prix.