Biographie de Jean Bodin

 

Jean Bodin
Jean Bodin

 

Informations principales

Jean Bodin est un économiste, mais également philosophe, théoricien politique et jurisconsulte français, né en 1529 ou en 1530 à Angers en France et mort en 1596 à Laon, dans le même pays.

Il a influencé l’histoire intellectuelle de toute l’Europe avec ses théories économiques et ses principes de « bon gouvernement » développés dans ses ouvrages, dont le plus important est l’œuvre Les Six Livres de la République. Grâce à cet ouvrage, il est aussi l’un des premiers à développer le concept de souveraineté. Il va poser les fondements théoriques de la monarchie absolue (caractérisée par une puissance absolue, indivisible, de commandement et perpétuelle) et les notions juridiques qui concernent la souveraineté des États. Grâce à son influence sur le Cardinal de Richelieu, principal ministre du roi Louis XIII, il est considéré comme l’un des fondateurs de l’absolutisme à la française.

Il a également réalisé d’autres apports, dont l’encadrement des attributions des juges et de l’administration et la constitution d’une distinction fondamentale entre l’État et le Gouvernement.

Dans le domaine de l’économie politique, il met en garde contre les dangers de l’inflation et élabore et développe (parmi d’autres économistes) la théorie quantitative de la monnaie.

Enfin, il a également établi une méthode comparative dans le domaine du droit et de l’histoire, ce qui amènera ensuite les travaux de Grotius et de Samuel von Pufendorf.

Jean Bodin peut avoir des positions à la fois jugées modernes et anciennes. En effet, il accorde beaucoup de poids à l’arithmologie et à l’astrologie dans son Traité de philosophie de la nature. Il a contribué à la répression de la sorcellerie à travers son Traité de démonologie. Il a aussi justifié la domination de l’homme sur la femme, et donc sur la nécessité d’exclure cette dernière du trône dans son ouvrage Les Six Livres de la République.

Toutefois, alors que la France est ravagée par les guerres de religion, il a défendu la tolérance religieuse en s’opposant notamment à une initiative royale qui avait pour objectif de lever des fonds dans le but de reprendre la guerre contre les huguenots. D’une manière générale, il a défendu l’idée de tolérance dans ses écrits.

 

Les Six Livres de la République, œuvre majeure de Jean Bodin

Jean Bodin a souhaité dépasser les frontières nationales, il a donc voulu repenser le droit romain, non pas seulement dans le cadre exclusif de la France de son temps, mais à travers un Tableau du droit universel, publié en 1568.

Suite à ses réflexions sur l’essence du droit, Jean Bodin a établi une systématisation du droit romain, en développant des classifications successives de deux parties. Le but est de faire en sorte que le droit soit réduit à de simples affirmations, ce qui est censé diminuer les risques d’interprétations subjectives dans le domaine de la justice.

Jean Bodin a publié son ouvrage Les Six Livres de la République en 1576, en pleines guerres de religion et seulement quatre années après la Saint-Barthélémy. Le terme de république pour lui désigne une chose publique qui est encadrée par le droit.

Cette œuvre développe toutes les réflexions de Bodin sur l’art de gouverner et sur le pouvoir du roi, qu’il considère comme le garant de la paix civile et qu’il est nécessaire de rétablir. En effet, pour lui, avec la disparition du consensus religieux et les guerres de religion, il faut affirmer l’autonomie du politique, de sorte à faire du roi un arbitre, et non pas un chef religieux.

Concrètement, ce livre comporte 42 chapitres répartis en six livres distincts.

Le premier livre traite de la fin principale dans une République bien ordonnée. Il y fait une comparaison avec le ménage. Bodin aborde aussi les thèmes de la puissance maritale, de la puissance paternelle, de la puissance seigneuriale, du sort des esclaves dans une République. Il donne une définition du citoyen, des traités entre les princes et de la souveraineté.

Le deuxième livre concerne les types de Républiques, à savoir la monarchie seigneuriale, tyrannique, royale, ainsi que l’état aristocratique et l’état populaire.

Le troisième livre concerne le Sénat, l’administration et les magistratures.

Le quatrième livre traite de la croissance et de la décadence des Républiques, les rapports du Prince avec ses sujets, et la manière de faire face aux séditions.

Le cinquième livre étudie la variation des Républiques en fonction des populations, du climat et de la topographie. Bodin y étudie également les lois sur la polygamie, l’attribution des charges officielles, ainsi que le sort des biens des personnes condamnées.

Enfin, le sixième livre contient tout ce qui concerne les finances et l’intégrité des monnaies. Bodin y traite aussi de la comparaison entre les trois formes de République. Il y aborde aussi la notion de justice distributive.

Dans ses divers travaux, Jean Bodin ne détaille pas seulement les pouvoirs du roi, mais tente de construire une théorie de la souveraineté, et plus spécifiquement une théorie juridique. Cet ouvrage a eu un important succès, ce qui en a fait l’une des œuvres qui a permis de poser les fondations du droit constitutionnel.

 

Le débat avec Jean de Malestroit concernant la monnaie et l’enrichissement de toute chose, ainsi que les bases de la théorie quantitative de la monnaie

Jean Bodin a traité l’analyse économique dans le livre six de son ouvrage Les Six Livres de la République.

Il se positionne nettement en faveur de la liberté de commerce, car il considère que pour qu’un royaume soit grand, le commerce doit être franc et libre. Cette vision sera reprise plus tard par les économistes libéraux.

La Chambre des comptes de Paris réalise une étude en 1563 dont le but était de rechercher un lien entre le renchérissement des choses et la dépréciation des monnaies. C’est dans ce contexte qu’en 1566, Jean de Malestroit publie Les paradoxes du seigneur de Malestroit sur le faict des monnoyes, dont sera tiré des préconisations émises au Conseil du roi l’année suivante. C’est à ce moment que Jean Bodin décide de publier en 1568 son ouvrage Réponse aux paradoxes de M. de Malestroit, car il n’était pas satisfait de l’étude qui avait été faite.

Le débat est compliqué, car à cette époque, la monnaie de compte (c’est-à-dire la livre tournois, le sol et le denier), et la monnaie en pièces étaient différentes.

Malestroit considérait que la hausse des prix était causée par des manipulations monétaires, et il était inquiet que la dépréciation de la monnaie entraîne une baisse du pouvoir d’achat. Néanmoins, Malestroit n’a pas comparé des prix réels, mais a pris en compte des prix de 1566 et des Ordonnances de surhaussement du prix des pièces de monnaie.

À contrario, Jean Bodin, dans sa Réponse part plutôt de l’évolution des prix qui ont été constatés à diverses époques. Cela lui permet de montrer que la hausse des prix provient essentiellement de l’afflux de métaux précieux (d’or et d’argent) en provenance du Nouveau Monde. Cet afflux a provoqué une révolution des prix. Cependant, cette hausse des prix est également engendrée, pour lui, par les nombreux monopoles qui existent, par des dépréciations des monnaies ce qui réduit les flux de marchandises, par les dépenses des rois et des princes, et enfin, par des manipulations monétaires.

Avec ce raisonnement, Jean Bodin est considéré comme l’économiste qui a posé les bases de la théorie quantitative de la monnaie, théorie qui sera reprise et développée par de nombreux autres économistes, tels qu’Irving Fisher et Milton Friedman.

 

Les notions de population et de richesse de l’État

Jean Bodin, à travers ses travaux, a proposé une vision relativement humaniste de l’économie et de la politique. Il a notamment affirmé, à ce propos, que la vraie richesse n’est pas uniquement matérielle, et que la force d’un pays se trouve dans sa population. Il considère à ce titre qu’il ne faut jamais craindre que la population soit trop importante. En effet, pour Jean Bodin, la richesse et la force se trouvent dans les Hommes.

Par ailleurs, plus il y a de citoyens, plus cela permet d’empêcher les séditions et les factions, car une partie d’entre eux se situe entre les riches et les pauvres, dans une classe moyenne, entre les bons et les méchants, et entre les sages et les fous. Pour Bodin, cette diversité est nécessaire, car il considère qu’il n’y a rien de plus dangereux que les individus d’une société soient divisés en deux parties, sans partie moyenne ou intermédiaire. C’est ce qu’il se passe généralement dans les régimes ayant peu de citoyens.

Au fil de sa vie, la pensée économique de Jean Bodin a évolué. Il est passé d’universaliste à mercantiliste. En effet, avec le temps, il a accordé une place plus importante au contrôle de l’État. Cela l’a amené à considérer que chaque nation devait se protéger pour préserver ses ressources vitales. Pour lui, cela ne peut se faire qu’à travers une politique gouvernementale dont le seul objectif doit être l’enrichissement du pays.

 

La contribution de Jean Bodin au mercantilisme

Jean Bodin affirme la suprématie du rôle de l’État et émet une théorie sur son rôle dans son ouvrage Les Six Livres de La République. Sa contribution à l’économie se trouve dans les réponses qu’il apporte à la controverse engagée par Malestroit concernant la monnaie et l’analyse des causes du « renchérissement de toutes choses » dans le Royaume de France.

À cette époque-là, la France fait face à une inflation élevée dont les causes ne sont pas encore révélées. En 1566, Malestroit apporte une explication à son origine. Pour lui, elle est causée par les manipulations monétaires auxquelles se livre le roi. La dépréciation du pouvoir d’achat de la monnaie peut donc s’expliquer pour lui, par la diminution de la quantité d’or des pièces de monnaie.

Néanmoins, Jean Bodin contredit la thèse de Malestroit dans sa Réponse aux paradoxes de M. de Malestroit, publiée en 1568. Il explique dans cet ouvrage que l’inflation vient d’un afflux d’or et d’argent en provenance d’Espagne. En effet, les quantités de métaux précieux (l’or notamment) issus des Amériques, dépassent les quantités de biens disponibles en Espagne, ce qui provoque un mécanisme inflationniste, d’abord en Espagne, mais qui se propage ensuite à l’ensemble des pays européens, en raison du déficit commercial espagnol. Pour Bodin, l’inflation en France a donc pour cause la surabondance d’or espagnol. Cela signifie qu’il donne à l’inflation une origine monétaire et établit même un lien de causalité direct entre, d’une part l’augmentation de la quantité de monnaie et, d’autre part, l’augmentation des prix.

Avec ce raisonnement, il place les fondements du raisonnement quantitativiste. Il prône également la restriction des échanges de manière à garantir une balance commerciale excédentaire. Il se place en partisan du protectionnisme, interdisant l’exportation des biens utiles à l’industrie française et limitant l’importation des produits manufacturés étrangers. C’est à travers ce raisonnement que Jean Bodin appartient au courant mercantiliste.

Toutefois, sa conception de la richesse l’éloigne quelque peu de la pensée mercantiliste. En effet, il ne considère pas que les métaux précieux constituent la richesse d’une nation. Cette dernière se trouve dans le produit de la terre et de l’industrie, ainsi que dans sa population. Selon Jean Bodin, il n’y a pas d’autre richesse que celle des Hommes. Avec cette théorie, il pose l’existence des lois économiques naturelles qui s’imposent à l’Homme. Ainsi, il apparaît comme le fondateur de l’interventionnisme économique de l’État, de la logique quantitativiste et d’une nouvelle approche de la richesse de la nation.

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