Biographie d’André Gunder Frank

 

André Gunder Frank
André Gunder Frank

 

Informations principales

André Gunder Frank est un économiste germano-américain, né le 24 février 1929 à Berlin, en Allemagne et mort le 23 avril 2005 à Luxembourg, dans le pays qui porte le même nom.

Son travail a permis un renouvellement de l’analyse de l’économie mondiale et du sous-développement. Dans sa vision de l’évolution du capitalisme, la domination occidentale n’est qu’une étape transitoire face à la domination de l’Asie passée et future. C’est à ce titre qu’il a critiqué le capitalisme. De plus, il est essentiellement connu pour être l’un des fondateurs, dans les années 1960, de la théorie de la dépendance et du système-monde.

Par rapport à ses pairs, il est considéré comme un économiste atypique et hétérodoxe (c’est-à-dire en dehors de la pensée majoritaire de son temps). Durant toute sa vie, il a régulièrement déménagé, en fonction d’emplois qui étaient généralement précaires.

D’un point de vue politique, il se situait à gauche et n’hésitait pas à le faire savoir. Cela ne l’a pas empêché de critiquer, autant les marxistes, que les keynésiens et les monétaristes. Les critiques qu’il a émises et ses opinions tranchées ont compliqué la publication de ses travaux et l’obtention de postes réguliers et stables dans plusieurs pays.

Malgré les difficultés qu’il a rencontrées durant sa vie, André Gunder Frank a été un auteur prolifique en publiant 50 livres et plusieurs centaines d’articles et de chapitres d’ouvrages collectifs durant toute sa carrière. Ses ouvrages ont été traduits en une trentaine de langues.

Par ailleurs, l’économiste américain Milton Friedman a été l’un de ses professeurs à l’université de Chicago.

 

Les concepts de développement et de dépendance développés par André Gunder Frank

Dans sa thèse de doctorat consacrée à l’agriculture soviétique, André Gunder Frank a développé le concept de productivité globale. Il va ensuite travailler sur l’Amérique latine, et notamment sur le Brésil et le Chili. Les études qu’il a publiées en 1967 et 1969 en font le pionnier de ce qui sera appelé quelques années après la théorie de la dépendance.

Avant lui, la plupart des économistes de tous les bords politiques (autant de droite que de gauche) voyaient le sous-développement comme un retard dans le développement. Ils expliquaient ce retard par des facteurs sociaux, culturels ou religieux, par des pénuries de capitaux, par le maintien de structures féodales ou d’institutions ancestrales, par un isolement géographique qui faisait que certains pays étaient trop loin des grands circuits commerciaux, par l’absence du sens des affaires propre à certaines populations ou encore par un climat trop chaud.

Ce pan de l’économie était alors notamment dominé par la théorie des étapes de la croissance par lesquelles tous les pays devaient passer tôt ou tard, formulée par Walt Rostow en 1960. Selon ce dernier, le développement se fait en cinq grandes étapes, à savoir la société traditionnelle qui correspond à l’origine, ensuite les conditions préalables au décollage, le décollage suit, puis la phase de maturité et enfin l’âge de la consommation de masse qui correspond, pour lui, à l’étape ultime de la société.

André Gunder Frank critique et rejette fermement ces raisonnements. En effet, selon lui, le capitalisme est plutôt structuré en centres métropolitains et en satellites périphériques, à l’échelle mondiale, mais également continentale, régionale, nationale et locale, et cela, dès sa naissance. Tous ces centres et satellites sont imbriqués dans une sorte de chaîne de rapports de dépendance qu’il compare à une constellation. Pour lui, le sous-développement se situe dans cette structure hiérarchique. Il juge même que ce sous-développement est produit et ensuite entretenu par le capitalisme.

Il considère par ailleurs qu’aucun secteur, y compris le plus isolé, d’aucun pays de la planète, n’échappe à cette intégration dans le capitalisme mondial. Dans le raisonnement qu’il réalise, les satellites génèrent le surplus économique, qui est alors approprié par les métropoles. Cela signifie donc que la croissance capitaliste engendre, à la fois le développement et le sous-développement, qui sont pour Frank, les deux faces d’une même pièce.

André Gunder Frank estime que le capitalisme a fait irruption dans les pays d’Amérique du Sud en même temps que les Espagnols et les Portugais au moment de la colonisation du 16ème siècle. Cela implique donc que ces pays d’Amérique du Sud n’ont jamais connu le féodalisme comme en Europe. Cela signifie pour Frank que leur sous-développement est la conséquence de la colonisation qui a elle-même entraîné le développement du capitalisme mondial.

De plus, il juge que les bourgeoisies locales et nationales et les individus les plus aisés des pays d’Amérique latine ont été complices de cette domination extérieure. Mais en même temps, ces bourgeoisies ne pouvaient pas sortir les pays du sous-développement dans la mesure où ce n’est pas un phénomène qui est imposé de l’extérieur, mais qui est intégré et assimilé dans ces sociétés de classes. Cela implique pour Frank que seule une profonde transformation sociale peut réussir à mettre fin au sous-développement, c’est-à-dire concrètement, une révolution socialiste.

C’est sur la base de ce développement que Gunder Frank a soutenu la révolution cubaine.

 

Les concepts de crise et d’économie mondiale

Au fur et à mesure de sa vie, la pensée d’André Gunder Frank n’est pas restée statique et a évolué. En effet, suite au coup d’État au Chili, il est revenu en Europe et à partir de là, il a modifié ses objets d’études. Dès lors, il va remettre en question certaines de ses pensées et idées antérieures. Il juge par exemple que le terme de « dépendance » est un euphémisme qui ne sert qu’à camoufler la subordination, l’aliénation, l’oppression et le racisme. Frank considère également que le terme de « sous-développement » est trop ambigu et doit donc être remplacé. Il estime qu’il faut dépasser ces concepts afin de les intégrer dans une analyse plus globale de l’évolution de l’économie mondiale.

Lors de la crise économique qui a commencé à la fin des années 1960 et qui s’est poursuivie dans les années 1970 avec notamment des chocs pétroliers, Frank rejette les explications qui font le lien entre la crise et les chocs pétroliers, qui mettent en cause le manque de flexibilité des marchés ou encore les manquements et les errements de l’État-providence comme le pensent de nombreux économistes. Pour lui, il s’agit d’une crise structurelle du même type que celle qui a touché les économies capitalistes à partir de 1873 (Grande Déflation) ou de 1929 (Grande Dépression). Selon lui, elle est, dès le départ, mondiale, dans la mesure où le capitalisme est un système qui se caractérise par son extension à l’échelle de la planète entière, par sa structure qui favorise les monopoles, et par son développement inégal et cyclique.

Dans plusieurs études qu’il a réalisées, André Gunder Frank prédit qu’il y aura une augmentation des inégalités et du poids de la dette dans les pays dépendants, le développement du néolibéralisme et des politiques d’austérité qui vont avec dans les pays du centre, la financiarisation du capitalisme mondial et l’intégration des pays socialistes à la division internationale du travail. De plus, il prévoit aussi que les nouveaux mouvements sociaux vont avoir un rôle capital dans la nouvelle conjoncture qui se dessine. Néanmoins, il estime que le capitalisme mondial va se régénérer et probablement surmonter cette nouvelle crise, avant d’éventuellement se désagréger.

Vers la fin de sa vie, André Gunder Frank va davantage s’intéresser au développement de l’économie mondiale sur le très long terme. Cela va l’amener à remettre en cause un certain nombre de concepts et de certitudes bien établies pour la majorité, mais aussi pour lui-même. C’est à ce titre qu’il va considérer que les termes de « capitalisme » et de « socialisme » n’ont plus de sens à force d’être dotés d’une multitude de définitions contradictoires les unes avec les autres. Pour lui, l’économie mondiale est depuis l’origine une structure hiérarchisée, dans laquelle l’Asie a occupé la première position jusqu’au 18ème siècle, contrairement à la vision traditionnelle. Cette analyse pousse Frank à considérer que la domination occidentale et européenne n’est que transitoire et qu’à terme, l’Asie, et plus particulièrement la Chine, récupérera une place prépondérante.

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