Informations principales
Ferdinando Galiani est un économiste italien, né le 2 décembre 1728 à Chieti, en Italie et mort le 30 octobre 1787 à Naples, dans le même pays.
Il est entré dans les ordres à l’âge de 22 ans, et a reçu plus tard des abbayes, ce qui lui vaudra le nom d’Abbé.
Galiani s’est intéressé assez tôt au sujet de la monnaie et de son statut. Il a attaqué les thèses qui prônent le laissez-faire et a même condamné ce qu’il qualifie de “secte” des économistes, qui croient que les lois universelles des affaires humaines existent. Les économistes en raison sont, en réalité, les physiocrates. En ce sens, il a été un fervent défenseur du mercantilisme.
Ferdinando Galiani s’est intéressé à de nombreux domaines, à l’économie, mais au-delà, à la philosophie, à la théologie, à l’histoire, à la géographie, à la géologie ou encore à l’archéologie.
Durant toute sa carrière, il a occupé des fonctions administratives importantes, notamment, celle de ministre à plusieurs reprises, et celle de secrétaire d’ambassade du royaume de Naples à Paris entre 1759 et 1769. C’est lors de cette période qu’il a fréquenté les salons parisiens, dans lesquels il était très apprécié. Ses amis comprennent notamment Diderot, qui a écrit deux textes pour défendre ses idées, le baron d’Holbach, Grimm (celui qui protège la famille Mozart), et Madame d’Épinay, dont sa correspondance avec Galiani donnera cinq volumes.
Les notions de valeur et de monnaie
Ferdinando Galiani a commencé à traduire dès l’âge de 15 ans l’essai de John Locke sur la monnaie. Il a rédigé, deux ans plus tard, une dissertation sur le statut de la monnaie au moment de la guerre de Troie, en se basant sur le poème d’Homère. C’est ensuite à l’âge de 19 ans qu’il a écrit l’une de ses œuvres les plus importantes sur le sujet de l’histoire des idées économiques, prénommé Della moneta (De la monnaie, en français). Cet ouvrage, qui concerne l’économie monétaire, se compose de cinq sections, à savoir l’histoire de la monnaie, la valeur (ce qui comprend l’inflation et la déflation), l’intérêt, et enfin, la politique monétaire.
Dans cet ouvrage, Ferdinando Galiani mène des recherches d’analyse économique, comme l’intégration de la théorie monétaire et de la théorie de la valeur. Il considère que la valeur est un rapport subjectif entre la quantité d’un bien et celle d’un autre bien. Ce rapport dépend de l’utilité et de la rareté. L’utilité en question n’est pas une caractéristique objective d’un objet. En effet, elle découle de la satisfaction des besoins du consommateur. La rareté, quant à elle, correspond à la proportion entre la quantité d’une chose d’une part, et l’usage qui en est fait, d’autre part. Cela permet d’expliquer le paradoxe selon lequel des objets très utiles peuvent avoir peu de valeur, alors que des objets peu utiles peuvent avoir une grande valeur.
Avec ce raisonnement, Galiani annonce la révolution marginaliste qui aura lieu plus de cent vingt ans plus tard. En effet, il développe les concepts d’utilité marginale et d’élasticité de la demande, mais sans en utiliser les termes.
De plus, comme les économistes classiques, il distingue le prix normal et permanent, la valeur intrinsèque, ainsi que la valeur extrinsèque, qui s’ajuste à long terme sur la valeur intrinsèque.
Galiani estime que, ce qu’il qualifie de “bel ordre moral de l’univers”, repose sur la monnaie. En effet, il considère que cette dernière est une marchandise qui est, comme les autres, dotée d’une valeur intrinsèque. Pour être acceptée par tous, cette marchandise-monnaie doit avoir trois caractéristiques. Celles-ci sont la durabilité, le fait que cela soit facile de connaître sa valeur, et le fait que cela soit difficile de commettre des fraudes avec. Galiani juge que ce qui répond parfaitement à ces exigences sont les métaux précieux, c’est-à-dire l’or et l’argent. Il ajoute à ce propos que ce n’est pas leur utilisation en tant que monnaie qui leur donne une valeur, ils sont utilisés comme monnaie, justement parce qu’ils ont une valeur.
Par ailleurs, Ferdinando Galiani distingue d’une part, la monnaie idéale, qui sert à évaluer, et d’autre part, la monnaie réelle, qui sert à acheter. Pour lui, le prince (le dirigeant du pays) ne peut pas donner la valeur qu’il veut au métal frappé, parce qu’elle doit être conforme à la valeur intrinsèque (c’est-à-dire à la valeur de la chose en tant que telle).
Il estime que la circulation de la monnaie est un effet, et non pas une cause de la richesse. Néanmoins, il ajoute également qu’une circulation insuffisante peut ralentir l’industrie et engendrer de la pauvreté.
Au-delà de cela, Galiani réprouve et condamne l’accumulation d’argent de la part des négociants, qu’il qualifie même de “tyrans du commerce”. Ces derniers, selon lui, ne produisent rien, à l’inverse de ceux qui cultivent ou qui fabriquent des choses ou des équipements. Les commerçants sont donc, pour lui, les personnes les moins utiles à l’État.
Ferdinando Galiani s’est opposé aux physiocrates
Le mariage du futur roi de France Louis XVI et de Marie-Antoinette en mai 1770 est célébré par d’importantes festivités. Néanmoins, le spectacle pyrotechnique va aboutir à une tragédie. En effet, une immense foule est rassemblée sur une place à Paris pour cet événement. Mais au moment de la disperser vers des rues en entonnoir, la foule est prise de panique, ce qui crée des vagues humaines qui s’opposent. Cela cause des centaines de morts et de blessés.
Quelques jours après, dans une lettre adressée à Madame d’Épinay, Ferdinando Galiani accuse les économistes d’être responsables de cette situation. Concrètement, il leur reproche d’avoir prêché la liberté et la propriété, d’avoir plus que critiqué l’ordre, la police et les règlements. Lui, à l’inverse, estime que la liberté de se déplacer, sans ordre ni réglementation, n’est pas un signe d’équilibre. C’est cela qui a provoqué ce désastre. Il ramène cette analyse à l’économie en considérant que le laissez-faire n’apporte pas spontanément l’équilibre et l’harmonie.
Quand il désigne les économistes, ce sont plus particulièrement les physiocrates, menés par François Quesnay. Au moment de leur apogée, dans les années 1760, ceux-ci croient qu’il existe des lois naturelles et universelles en économie et prônent le laissez-faire, et notamment en ce qui concerne la circulation et l’exportation des céréales. La liberté d’exportation de blé sera décrétée en 1764, mais elle est suivie d’une série de mauvaises récoltes, ce qui va provoquer des hausses de prix et une famine. Le marché du blé sera alors à nouveau réglementé en 1770, avant que Turgot ne réinstaure, en 1774, le libre-échange. Galiani a critiqué la décision de ce dernier, en prévoyant des effets catastrophiques, ce qui va se produire avec la “guerre des farines” et les émeutes de 1775.
Dans une de ses autres lettres à Madame d’Épinay, Galiani se décrit comme étant le premier, et aussi le seul homme de bien et d’esprit qui ait osé montrer le vrai visage des économistes, à qui il trouve tous les défauts.
Dans son essai économique publié en 1770, intitulé Dialogues sur le commerce des bleds, il s’attaque aux thèses défendues par les physiocrates en proposant une vision opposée, basée sur l’expérience (c’est-à-dire empirique) et sur le pragmatisme des politiques économiques. Selon lui, ces dernières doivent être adaptées au contexte historique et institutionnel dans lequel elles sont appliquées. Galiani juge que le monde réel est beaucoup plus varié et changeant que ce que supposent François Quesnay et ses partisans.
Il estime également qu’il est dangereux de faire des conclusions politiques à vocation universelles. En effet, cela signifie, par exemple, qu’une politique comme la liberté d’exportation des grains peut être valable en Angleterre, mais être, à contrario, contre-indiquée en France (comme le montrent les problèmes que cela a créés). Cela signifie pour Galiani que le meilleur système au sujet du commerce est de justement ne pas avoir de système général, dans la mesure où chaque pays a des modes de traitement qui diffèrent selon les circonstances. Cela va l’amener à défendre certaines positions mercantilistes contestées comme le fait qu’un pays ne peut s’enrichir qu’en pénalisant un autre pays, ou encore en défendant la dévaluation de la monnaie par les gouvernements si cela est jugé nécessaire.
Selon Galiani, les affaires humaines, caractérisées par le temps et l’incertitude, peuvent invalider les meilleures lois. Il ajoute qu’il faut se méfier des changements soudains et brutaux de politique. Ce raisonnement l’amène à critiquer l’idée selon laquelle il est possible de déduire, de manière théorique, des lois universelles concernant les affaires humaines. Il critique également le concept qui veut que l’économie tende, de manière spontanée, à l’équilibre. Il condamne également l’amalgame qui est fait entre les sciences naturelles et les sciences sociales.