Informations principales
Thomas Robert Malthus est un économiste britannique et prêtre anglican, né le 13 février 1766 à Dorking et mort le 29 décembre 1834 à Bath.
Malthus fait partie du courant classique. Il est essentiellement connu pour ses travaux sur les dynamiques de croissance de la population avec celles de la production. Il a une vision pessimiste des choses, contrairement à l’économiste Adam Smith qui voit plutôt un équilibre stable et harmonieux.
Son nom a donné naissance à l’adjectif malthusien et à la doctrine du malthusianisme qui préconise une politique active de contrôle de la natalité afin de maîtriser la croissance de la population. Il a mis au point cette doctrine en partant du principe que le nombre de personnes augmente beaucoup plus rapidement que les surfaces cultivables pour nourrir toutes ces personnes.
L’économiste John Maynard Keynes a, plus tard, été inspiré par une partie de ses travaux, et notamment ceux sur l’offre et la demande et sur la notion de surproduction.
Thomas Malthus a beaucoup réfléchi dans sa vie de sorte que sur certains sujets, il est difficile d’établir une ligne claire de sa pensée, il a pu changer d’avis au fil du temps, ou avoir des raisonnements incomplets.
La croissance et la démographie analysées par Thomas Malthus
Les concepts de croissance et de démographie impliquent d’aborder des notions telles que la corrélation qu’il y a entre la croissance économique et la croissance démographique, ainsi que celle de la régulation volontaire des naissances.
Corrélation entre la croissance économique et la croissance démographique
Malthus dénonce les dangers d’une expansion trop forte de la population qui est, selon lui, incompatible avec une croissance équilibrée. Si c’était le cas, cela serait à l’origine de la misère et de tout ce que cela entraîne.
Le problème du nombre d’individus est important pour Thomas Malthus. Il faut pour lui éviter une augmentation excessive de la population qui progresse de manière géométrique (c’est-à-dire de manière exponentielle et constante en valeur absolue) par rapport à la production insuffisante de subsistance qui progresse quant à elle, de manière arithmétique (c’est-à-dire avec toujours le même nombre d’augmentation par période). Cela signifie que la croissance économique ne peut pas exister si l’équilibre n’est pas atteint et durable.
Cependant, la corrélation entre la croissance économique et la dynamique démographique doit se faire dans le cadre de l’évolution des structures sociales et des institutions politiques. Malthus considère que celles-ci doivent s’adapter aux éventuelles variations. En effet, dans le cas où la croissance de la population vient d’une amélioration des conditions économiques, cela doit se faire dans un cadre institutionnel approprié, sinon cela peut créer des effets pervers tels que réduire la croissance économique, ou même la faire disparaître si la croissance démographique est trop importante. Malthus donne pour ce cas l’exemple de l’Irlande qui a vu sa population augmenter avec l’utilisation accrue des pommes de terre. Mais à cause de structures sociales et politiques inadaptées, les difficultés précédentes sont ensuite revenues rapidement.
Thomas Malthus est pessimiste sur la nature humaine et considère qu’il ne peut pas y avoir de régulation automatique du volume de la population à cause de la tendance à procréer des humains. Cette tendance est inversée seulement lors de désastres naturels ou d’usages différents, selon le degré de civilisation et les régions.
La régulation volontaire des naissances
La notion de régulation volontaire des naissances était une notion très novatrice à l’époque de Malthus. Mais celui-ci, pasteur et donc croyant, admettait l’abstinence avant le mariage, mais pas pendant, un couple une fois marié devait donc accueillir tous les enfants que Dieu leur donnait.
Malthus a approfondi sa pensée en estimant que pour qu’une nation accède à la richesse et au bonheur, il faut que le nombre de ses habitants ne soit pas supérieur à la quantité de subsistance disponible, mais également que cette population soit éduquée, saine et vigoureuse. En effet, pour lui, l’éducation permet de lutter contre la pauvreté et permet de stabiliser la population pour aller vers la croissance.
Il considère que ne pas instruire et ne pas donner de travail aux citoyens encourage l’oisiveté, et donc la procréation. Cela engendre une nouvelle population qui est aussi vouée à vivre dans la pauvreté et la misère, ce qui entretient le cycle.
Malthus a constaté que les pauvres ont plus d’enfants que les riches et que le degré d’instruction d’un peuple est primordial sur le taux de renouvellement des générations.
Il souhaite donc, par l’éducation et la maîtrise de la natalité, la diminution de la pauvreté et le développement d’une classe moyenne.
Pour arriver à ces conclusions, il a su utiliser et développer l’outil statistique avec notamment des recensements, des calculs prévisionnels, des analyses et comparaisons, etc.
Même s’il a fait de nombreuses analyses correctes, Malthus n’a pas prévu un certain nombre de choses. Par exemple, avec le temps, la population a augmenté considérablement, les catastrophes naturelles, guerres ou pandémies n’ont pas ralenti sa progression. De plus, il n’avait pas non plus anticipé les progrès faramineux de la médecine qui ont permis d’allonger l’espérance de vie, ni l’apparition et l’utilisation intensive de produits pour augmenter les rendements agricoles (tels que les engrais et les pesticides).
La question de la pauvreté, sujet important pour Thomas Malthus
Thomas Malthus en tant que pasteur a été confronté à la pauvreté.
Au-delà des classes productives, il considère qu’il existe deux grandes classes, les riches et les pauvres. Les riches peuvent assurer la subsistance des enfants que leur foyer accueille (grâce à Dieu) alors que les pauvres ne peuvent assurer la subsistance d’enfants qui ne viendraient de toute manière pas de la Providence, mais de leur intempérance sexuelle. Il faut donc les en empêcher.
Malthus estime que l’Homme est paresseux et qu’il procrée tant que sa famille est bien nourrie sans être prévoyant, de sorte que si un drame arrive (comme une mauvaise récolte agricole par exemple), la famille se retrouve dans la détresse.
Il considère aussi que la classe riche peut augmenter sans trop de crainte, mais pas la classe pauvre qui ne doit pas trop augmenter sous peine d’entraîner des ravages importants. La population ne doit pas trop augmenter, car l’augmentation de la production ne pourra alors pas suivre. Pour atteindre l’harmonie, il faut donc que les pauvres ne se multiplient pas au-delà de la disponibilité des biens de subsistance. En ce sens, Malthus s’oppose aux aides de l’État envers les pauvres puisqu’il considère que compléter le salaire d’une famille pour qu’elle subsiste revient à encourager le manque d’effort et la paresse des pauvres, ce qui est au final nocif pour toute la société.
Les riches ont le droit au bonheur et à l’abondance au vu de leurs moyens, mais il vaut mieux ne pas aider les pauvres, les laisser dans leur situation (c’est-à-dire les laisser mourir de faim) va permettre de réguler la population qui reviendra alors à un niveau acceptable par rapport aux biens disponibles.
Cette réflexion repose sur l’hypothèse que les ressources sont limitées et finies. Si la population augmente constamment, la quantité de biens à se partager se réduit de plus en plus pour chaque individu. Malthus considère donc qu’étant donné que l’espace et les terres cultivables sont déterminés et finis, la population doit s’y adapter et donc, elle aussi être finie.
L’analyse de Thomas Malthus sous-entend que la société est figée et que chaque personne est vouée à rester dans sa catégorie, sans possibilité d’évolution notable. Cependant, au fil de sa vie, ses positions ne sont pas restées complètement figées et ont pu évoluer.
Les mécanismes de la vie économique analysés par Thomas Malthus
Thomas Malthus a cherché à comprendre les mécanismes de la vie économique ainsi que les conditions d’une croissance équilibrée (notamment dans son ouvrage de 1820 « Principes d’économie politique« ).
Vision commune avec les économistes classiques
Malthus ne partage pas la vision des économistes classiques (même s’il est fidèle à ce mouvement) selon laquelle une main invisible (notion d’Adam Smith) peut tout arranger et favoriser l’élaboration d’un monde meilleur.
Cependant, il rejoint une grande partie des classiques. Il met le marché au centre du modèle. La confrontation de l’offre (c’est-à-dire les producteurs) et de la demande (c’est-à-dire les consommateurs) doit amener à une situation d’équilibre et assurer à chacun une satisfaction maximale. De plus, la propriété est forcément privée et chaque individu agit pour son propre intérêt. L’individualisme doit amener grâce à la concurrence un meilleur équilibre et de la croissance.
Différences avec les économistes classiques
Cependant, Malthus se distingue des économistes classiques sur d’autres points tels que le jeu des protagonistes, les notions de richesse et de valeur (y compris la valeur travail), le rôle des salaires, l’importance de la demande par rapport à l’offre et l’analyse de la crise.
Malthus soutient le propriétaire foncier et veut le protéger, car il considère que l’économie est avant tout agricole et donc nourrit la population. Le capitaliste veut faire le maximum de profit par rapport au capital qu’il a investi. Et le travailleur ou l’ouvrier est celui qui vend sa force de travail en échange d’un salaire. Ce salaire lui permet seulement d’assurer sa subsistance, à le maintenir en vie sans plonger dans l’oisiveté, qui est considérée par Malthus comme la mère de tous les vices.
Thomas Malthus se distingue également des économistes classiques sur les notions de richesse, de valeur et de travail. En effet, pour lui, la richesse correspond à tous les objets matériels qui sont utiles ou agréables à l’individu et qu’il a fallu faire des efforts pour les produire ou pour se les approprier. Un pays sera donc riche ou pauvre en fonction de l’abondance ou de la rareté des objets matériels qu’il a par rapport à son territoire, ou en fonction de l’abondance ou de la rareté de ces objets par rapport à la population. Les objets immatériels ne sont pas considérés comme faisant partie de la richesse.
Malthus considère que la richesse ne peut pas être séparée de la valeur. De plus, la valeur n’a pas de lien avec l’utilité, par exemple l’air est utile, mais n’a pas de valeur. La valeur d’un objet se mesure alors à l’usage plus ou moins courant qui en est fait et en fonction de la demande qui en résulte. Chaque chose peut ainsi avoir une valeur nominale qui est sa propre valeur en comparaison de tous les autres objets. Cette valeur permet d’obtenir un prix qui va dépendre de la rareté et du désir de posséder cet objet, c’est ce que Malthus appelle la valeur intrinsèque d’échange.
Par ailleurs, pour Thomas Malthus, l’offre ne crée pas la demande, car il considère que c’est une erreur de croire que l’humanité va produire et ensuite consommer tout ce qu’elle a la capacité de produire et de consommer. La demande ne s’adapte pas de manière systématique à l’offre. Pour lui, l’offre est toujours proportionnée à la quantité, et la demande à la valeur. Mais si la quantité augmente, la valeur baisse, ce qui entraîne la diminution des moyens d’acheter, ce qui restreint à son tour les débouchés. Pour Malthus, ce qui compte est donc seulement la demande effective qui permet d’enclencher la machine économique.
Explication du phénomène de crise
À partir de cette analyse, il développe une explication au phénomène de crise. Pour lui, il y a deux phases. La première dans laquelle le capitaliste utilise sa richesse comme il veut, pour investir, épargner ou encore dépenser. Ces décisions vont permettre d’accroître le nombre de travailleurs productifs et donc la quantité de marchandises offertes sur le marché. Cela va faire baisser les prix alors que le montant global des salaires va augmenter. Les travailleurs qui étaient improductifs avant vont devenir productifs et être mieux payés du fait de la concurrence entre les capitalistes. Toutes ces actions vont profiter aux travailleurs.
Cependant, la deuxième phase commence. La nouvelle situation va entraîner une forte expansion de la production qui ne pourra pas être absorbée par la demande. Les capitalistes vont baisser les coûts des machines, mais la baisse des profits va provoquer une baisse de l’investissement. Le marché étant inondé de produits, les prix vont baisser, les salaires vont rester élevés et les profits se réduire, cela créera ce que Malthus désigne comme un engorgement. Cela signifie que la quantité d’emploi va diminuer, le chômage augmenter et la richesse produite se réduire.
C’est finalement la surproduction qui crée la crise pour lui.
Thomas Malthus considère que l’État peut faire de grandes dépenses à travers l’expansion monétaire et la distribution, mais cela ne créera qu’un élan temporaire au commerce. Il préconise aussi d’employer les chômeurs pour réaliser certains travaux (comme réparer des routes ou réaliser des travaux publics).
Par ailleurs, contrairement aux économistes classiques, Malthus accorde une place importante à la monnaie. Comme les salaires sont payés en monnaie, ils sont liés à ses fluctuations. Il distingue aussi la valeur nominale et la valeur réelle.
Malthus admet également qu’une quantité importante ou insuffisante de papier-monnaie sur le marché peut faire varier les prix, mais au même titre que les variations de la quantité des produits. Il sera un grand partisan de l’étalon-or.
Concernant le commerce extérieur, il se montrera plutôt protectionniste.