Conférence Océan de l’ONU 2025 : quel avenir pour l’économie maritime française ?

 

Conférence Océan de l’ONU 2025 : quel avenir pour l’économie maritime française ?
Conférence Océan de l’ONU 2025 : quel avenir pour l’économie maritime française ?

 

En accueillant à Nice la Conférence Océan de l’ONU 2025, la France place l’économie maritime française et mondiale au cœur des débats internationaux. Cet événement majeur, qui réunit pendant cinq jours chefs d’État, scientifiques, entreprises, société civile et ONG, pose une question cruciale : comment bâtir une relation durable et à tous les niveaux entre les êtres humains et les océans ? Dans un monde confronté à des crises économiques, écologiques et géopolitiques en cascade, cela rend le sujet crucial, d’autant plus pour la France, qui possède le deuxième espace maritime mondial.

La Conférence Océan, organisée par l’ONU tous les 3 à 5 ans vise à renforcer la coopération mondiale pour la protection des mers, la gestion des ressources marines et la lutte contre les effets du changement climatique sur les océans.

Selon les derniers chiffres disponibles datant de 2019, l’économie maritime française pesait près de 43 milliards d’euros de valeur ajoutée et mobilisait près de 525 000 personnes. Du tourisme littoral au transport maritime, de la construction navale à la pêche ou encore de la marine nationale à l’énergie et aux matières premières, le tissu économique maritime est à la fois dense et stratégique pour la souveraineté et la transition du pays.

Cette économie s’accompagne toutefois d’une responsabilité écologique. La France gère des millions de kilomètres carrés d’espaces maritimes, qui abritent des écosystèmes parmi les plus riches et les plus menacés au monde. Face à l’érosion de la biodiversité, à la surpêche, à la pollution plastique ou à l’acidification des océans, la mobilisation pour une meilleure protection du milieu marin devient une priorité.

Concilier la croissance maritime et la transition écologique suppose des transformations importantes. La décarbonation du transport maritime, le déploiement des énergies renouvelables en mer, la planification spatiale maritime ou encore l’émergence de nouvelles filières d’innovation sont autant de leviers pour construire une économie bleue plus résiliente. Mais cela nécessite une vision, des investissements, et une gouvernance efficace.

Toutes ces transformations dessinent les contours d’un tournant pour l’économie maritime française. Entre nouvelles technologies, attentes environnementales et concurrence mondiale accrue, le secteur maritime doit se réinventer pour rester compétitif, attractif et compatible avec les limites planétaires.

Cette édition de la Conférence Océan de l’ONU 2025 est non seulement un rendez-vous diplomatique, mais aussi l’occasion de réfléchir à l’avenir et de prendre des décisions pour notre futur. 

 

Qu’est-ce que la Conférence Océan de l’ONU et pourquoi se tient-elle en France ?

La Conférence Océan de l’ONU est l’un des principaux rendez-vous internationaux consacrés à la protection des mers et des océans, sachant que l’eau couvre près de 72 % de la surface de la Terre. Au niveau mondial, 800 millions de personnes (soit 1 terrien sur 10) dépendent de la pêche comme moyen de subsistance.

Organisée tous les trois à cinq ans sous l’égide des Nations unies, elle rassemble chefs d’État, institutions scientifiques, entreprises, ONG et représentants de la société civile autour d’un objectif commun, celui de préserver la santé des océans tout en favorisant un développement durable des activités maritimes. L’édition 2025, la troisième du genre après celles de New York en 2017 et Lisbonne en 2022, se tient du 9 au 13 juin à Nice, sur la côte méditerranéenne française et a pour thème principal “Accélérer l’action et mobiliser tous les acteurs pour conserver et utiliser durablement l’océan”.

Cette conférence s’inscrit dans le cadre de l’Agenda 2030 des Nations unies, et plus particulièrement de l’Objectif de développement durable n°14 (ODD 14), qui vise à « conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines« . Elle doit permettre d’avancer sur plusieurs enjeux cruciaux : la lutte contre la pollution plastique, l’extension des aires marines protégées, l’adaptation au changement climatique, l’encadrement de la haute mer (c’est-à-dire qui n’est pas sous contrôle national), ou encore le financement de la transition écologique du secteur maritime. Concrètement, il s’agit de trouver des solutions concrètes pour assurer un avenir durable aux océans. Ces thèmes sont traités à travers des dialogues interactifs, des forums multi-acteurs et des engagements concrets de la part des États et des entreprises.

Le choix de la France comme pays hôte pour cette édition 2025 n’est pas anodin. Avec le deuxième espace maritime mondial derrière les États-Unis grâce à ses territoires ultramarins, la France est l’un des pays les plus concernés par la gouvernance des océans. Elle dispose d’une responsabilité particulière en matière de biodiversité marine, de surveillance des zones économiques exclusives et de coopération internationale dans les domaines scientifiques et juridiques. En accueillant la conférence à Nice, la France cherche à renforcer son leadership diplomatique sur les questions maritimes, tout en donnant de la visibilité à ses engagements en faveur d’une économie bleue durable. 

La tenue de cette conférence sur le sol français marque également une volonté politique de replacer les enjeux océaniques au cœur des priorités internationales. Près de 10 ans après les Accords de Paris de 2015 où la France a joué un rôle majeur dans la lutte contre le dérèglement climatique, notre pays est à nouveau à la manœuvre. À l’heure où les tensions géopolitiques et environnementales redéfinissent l’accès aux ressources maritimes, cette rencontre mondiale offre une occasion unique de consolider les partenariats autour de la mer et de discuter des défis économiques, sociaux et environnementaux que cela implique.

 

L’économie maritime française : un pilier stratégique

Souvent méconnue du grand public, l’économie maritime française représente pourtant un levier stratégique pour la croissance nationale. En regroupant l’ensemble des activités liées à la mer, qui vont de la pêche à la construction navale, en passant par toutes les énergies marines, le transport maritime, le tourisme littoral, le domaine militaire, les terres rares ou encore la recherche océanographique, elle forme ce qui est appelé l’économie bleue. Ce vaste ensemble contribue de manière significative à l’emploi, à la production nationale, à la compétitivité industrielle, à la souveraineté et à la transition énergétique du pays.

Selon les chiffres clés de la mer et du littoral publiés par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires dans son édition 2024, l’économie maritime française représentait, en 2019, 1,5 % du PIB de la France et générait cette même année plus de 43 milliards d’euros de valeur ajoutée toutes catégories confondues. De plus, elle mobilisait près de 525 000 personnes, soit 1,7 % des emplois nationaux.

Dans ce montant global, le tourisme littoral est de loin le domaine d’activité prépondérant avec 56 % de la valeur ajoutée de l’économie maritime (soit 24,1 milliards d’euros) et 64 % des emplois (336 700 emplois). En matière de valeur ajoutée, il est suivi par les secteurs parapétrolier et paragazier offshore, bien que ces domaines n’emploient que 22 500 personnes.

La construction et réparation de navires, le transport maritime et fluvial et l’ensemble de la filière des produits de la mer (pêche maritime, aquaculture marine, transformation, commerce de gros et au détail) représentent chacun entre 6 à 7 % de la valeur ajoutée et des emplois.

Les domaines du secteur public, dont les activités prises en compte sont la marine nationale, l’intervention de l’État en mer, la protection de l’environnement littoral et marin et la recherche marine, représentent de manière globale 8 % de la valeur ajoutée et 9 % des emplois.

D’autres secteurs, de taille plus modeste, tels que la fabrication, la pose et la maintenance de câbles sous-marins, les travaux publics maritimes et fluviaux, l’extraction de granulats, la production du sel contribuent à l’économie maritime nationale à hauteur de 3 % pour la valeur ajoutée et 4 % pour les emplois.

Il est à noter le rôle majeur que les ports français jouent dans le commerce international. Il y a par exemple Le Havre, Marseille, Dunkerque ou encore Nantes-Saint-Nazaire qui sont autant de plateformes logistiques qui assurent l’ancrage de la France dans la mondialisation

Avec plus de 10 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE), la France dispose du deuxième espace maritime au monde après celui des États-Unis. Cela représente tout de même plus de 20 fois la surface des terres, dont 97 % se situent dans les Outre-mer. Cette géographie exceptionnelle lui confère une responsabilité unique, mais aussi une opportunité stratégique. Elle a tous les moyens en sa possession pour bâtir une économie maritime à la fois performante, innovante et résiliente. Dans ce contexte, la croissance bleue s’affirme comme un axe prioritaire de la souveraineté économique nationale.

 

Conférence Océan de l’ONU 2025 : quel avenir pour l’économie maritime française ?
Conférence Océan de l’ONU 2025 : quel avenir pour l’économie maritime française ? : Zone économique exclusive française

 

Enjeux environnementaux : la France face à ses responsabilités maritimes

La France est une puissance maritime mondiale, mais cette position privilégiée s’accompagne d’une responsabilité particulière face à la dégradation des écosystèmes marins. Avec des littoraux répartis sur quatre océans et une biodiversité parmi les plus riches de la planète, elle se trouve en première ligne des enjeux environnementaux liés à la mer. Pollution plastique, surexploitation des ressources, réchauffement des eaux, destruction des habitats côtiers, les menaces qui pèsent sur les océans ne cessent de croître, tout en impactant l’économie, et la France n’y échappe pas.

Les pollutions marines, qu’elles soient d’origine terrestre ou maritime, affectent directement les zones côtières françaises. Chaque année, plusieurs dizaines de milliers de tonnes de déchets plastiques finissent en mer, ce qui perturbe les chaînes alimentaires marines et menace la faune, notamment les tortues, les oiseaux marins et les mammifères. La pollution chimique, issue des rejets agricoles ou industriels, fragilise également les écosystèmes, tout comme la pollution sonore, liée à l’intensification du trafic maritime. Selon une enquête de plusieurs médias coordonnée par Le Monde, publiée au début de l’année 2025, nettoyer l’Europe des polluants éternels (PFAS) coûterait au moins 95 milliards d’euros sur vingt ans dans les conditions les plus favorables et la facture pourrait atteindre 2.000 milliards d’euros, soit 100 milliards d’euros par an.

Autre défi majeur, celui de la perte de biodiversité marine. De nombreuses espèces, comme le mérou en Méditerranée ou certaines populations de dauphins dans l’Atlantique, voient leur survie menacée par la pression humaine. L’artificialisation des littoraux, les aménagements portuaires, l’extraction de matériaux au fond de l’eau et la surfréquentation touristique accentuent ces déséquilibres. Par ailleurs, la surpêche, bien que plus encadrée qu’auparavant, continue d’exercer une pression forte sur certains stocks halieutiques, malgré les efforts de gestion durable.

Le dérèglement climatique aggrave encore la situation. L’élévation du niveau de la mer et son réchauffement mettent en péril les littoraux français, en particulier dans les territoires ultramarins et les zones de faible altitude. Le réchauffement des eaux bouleverse les équilibres biologiques et favorise la migration d’espèces, avec des conséquences parfois imprévisibles sur les chaînes alimentaires, les pêches locales ou même le tourisme. L’acidification des océans, due à l’absorption du CO₂, menace quant à elle le développement des récifs coralliens et des organismes calcaires. Rien qu’à cause de la montée des eaux et de l’érosion du littoral, ce sont 450.000 logements qui sont menacés en France d’ici 2100 selon une étude du Cerema, pour un coût de 86 milliards d’euros.

Face à ces défis, la France a pris des engagements ambitieux. Elle s’est fixée pour objectif de protéger au moins 30 % de son espace maritime (c’est-à-dire de créer des aires protégées) d’ici 2030, dont 10 % en protection forte. Selon le ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en février 2022, 33 % des eaux françaises sont couvertes par au moins une aire marine protégée, ce qui dépasse l’objectif de 30 % des espaces maritimes et terrestres français en aires protégées. Le pays dispose aujourd’hui de plus de 550 aires marines protégées dont l’objectif est de protéger des écosystèmes marins et permettre un développement durable des activités maritimes. La mise en œuvre concrète des aires protégées au niveau mondial, tout comme leur extension, est l’un des enjeux clés évoqués lors de la Conférence Océan de l’ONU 2025.

Au début de cette Conférence à Nice, il a été annoncé par la France sa volonté de protéger 78 % des eaux avec des aires marines protégées et 14 % en protection forte, et même au-dessus de 10 % en protection stricte. Ces annonces restent cependant à être concrétisées en engagements concrets, notamment à travers des lois. 

De plus, Emmanuel Macron a annoncé ces derniers jours que le traité sur la haute mer (BBNJ) rentrera en vigueur le 1er janvier 2026. Le traité de protection de la haute mer donnera des moyens d’action pour la conservation et la gestion durable de la biodiversité marine dans l’immense partie des océans qui n’appartient à personne (c’est-à-dire hors ZEE). Baptisé “Marine Biodiversity of Areas Beyond National Jurisdiction”, il a été adopté en septembre 2023 au siège des Nations unies à New York par 115 Etats, et doit être ratifié par au moins 60 Etats pour sa mise en application effective. Emmanuel Macron a annoncé que plus de 60 pays se sont engagés à Nice à ratifier le traité de protection de la haute mer avant septembre (pour une entrée en vigueur début 2026).

Il est à noter que le concept d’aire marine protégée est critiqué par certaines ONG ou scientifiques parce que ce type d’aire ne protégerait pas vraiment les océans en permettant par exemple des types de pêches très destructrices (comme le chalutage de fond). Ce sont surtout les aires marines en protection forte qui les interdisent vraiment.

La France joue également un rôle actif dans les négociations internationales, d’une manière globale, ou comme pour la protection de la haute mer, notamment à travers le Traité sur la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales (BBNJ), dont l’annonce de sa ratification a été annoncée à cette conférence. Sur le plan scientifique, elle soutient la recherche océanographique et les systèmes de surveillance, en lien avec l’Ifremer et le CNRS, afin de mieux comprendre les dynamiques marines et adapter ses politiques publiques.

 

Quels leviers pour concilier croissance maritime et transition écologique ?

Le défi de concilier le développement économique et la protection des milieux marins se pose aujourd’hui avec une pertinence particulière. À l’heure où l’économie maritime mondiale cherche un nouveau modèle face aux limites écologiques, la France peut inventer une croissance maritime durable, à la fois compétitive et respectueuse des écosystèmes. Cela peut passer par plusieurs leviers structurants, tant au niveau national qu’international.

Le premier levier concerne la transition énergétique du transport maritime, qui reste l’un des secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre. Pour atteindre les objectifs climatiques européens et internationaux, les armateurs doivent investir massivement dans la décarbonation des navires, en misant sur les carburants alternatifs (comme le méthanol, l’hydrogène ou l’ammoniac), l’électrification à quai ou encore la propulsion vélique (c’est-à-dire grâce au vent). Les chantiers navals français, comme ceux de Saint-Nazaire, peuvent jouer un rôle moteur dans cette mutation technologique.

Un autre des leviers est celui du développement des énergies marines renouvelables. L’éolien en mer, en particulier dans sa version flottante, est aujourd’hui en pleine expansion sur les côtes françaises. Il représente une opportunité stratégique pour produire une énergie bas carbone à grande échelle, tout en soutenant l’emploi industriel. La France possède également un fort potentiel dans l’hydrolien et la valorisation thermique des mers. Certaines de ces solutions sont encore émergentes, mais prometteuses.

La planification maritime est un troisième levier qui semble essentiel. Concilier les usages en mer (pêche, énergie, transport, biodiversité, tourisme) nécessite une gestion plus fine et mieux coordonnée de l’espace maritime. Le document stratégique de façade (DSF) et la stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML) fixent aujourd’hui un cadre, mais doivent être renforcés par des décisions opérationnelles et territorialisées, en intégrant les parties prenantes locales et les données scientifiques.

L’innovation joue également un rôle clé dans cette transition. L’économie bleue de demain reposera sur les technologies propres telles que des navires autonomes à faible impact, des capteurs environnementaux, l’intelligence artificielle appliquée à la gestion des flux maritimes ou encore les matériaux biosourcés pour la construction navale. La France peut tirer parti de son écosystème de start-up maritimes et de ses pôles de compétitivité pour accélérer la transformation du secteur, ce qui procurera des gains environnementaux, mais également économiques et en matière de souveraineté.

Enfin, il est indispensable de mobiliser des financements publics et privés en faveur d’une croissance bleue durable. Cela suppose de mieux flécher les investissements, d’orienter les aides publiques vers des projets à impact environnemental positif, et d’encourager les bailleurs à intégrer des critères écologiques dans leur évaluation des risques. À l’échelle européenne, le Pacte vert pour l’Europe et les fonds de relance offrent des opportunités concrètes à saisir. Au-delà de l’environnement, privilégier des entreprises européennes est essentiel pour conserver notre souveraineté et notre indépendance.

Au-delà de la dimension nationale ou même européenne, c’est le monde entier qui doit se mobiliser. Malgré son poids économique et diplomatique important, la France reste un “petit” pays qui ne peut pas, à lui tout seul, régler des problèmes d’ampleur mondiale. C’est la raison pour laquelle la Conférence Océan de l’ONU 2025 est importante. Elle permet de réunir en un seul lieu des milliers de personnes, dirigeants, organisations, politiques, etc pour trouver des solutions aux problèmes et améliorer notre avenir commun. Il ne s’agit pas seulement de statistiques ou de température, mais de la manière dont nous vivrons dans le futur, dont nous pourrons nous nourrir ou faire fonctionner une partie de notre économie (avec les emplois qui en dépendent).

Concilier la croissance maritime et la transition écologique, au vu de toutes les crises que nous connaissons, s’impose donc comme une nécessité. Pour la France, cela signifie adapter ses outils, soutenir ses filières et assumer un rôle moteur dans la gouvernance maritime mondiale. Les débats engagés lors de la Conférence Océan de l’ONU 2025 devront servir de tremplin à cette mutation profonde du modèle maritime.

 

Conférence Océan de l’ONU 2025 : quel avenir pour l’économie maritime française ?
Conférence Océan de l’ONU 2025 : quel avenir pour l’économie maritime française ?

 

Un tournant pour l’économie maritime française ?

La Conférence Océan de l’ONU 2025 intervient à un moment charnière pour l’économie maritime française. Sous la pression conjuguée des impératifs environnementaux, de la montée en puissance des énergies marines, de la concurrence internationale et des attentes citoyennes, c’est l’ensemble du modèle maritime français qui semble en pleine redéfinition. La question n’est plus seulement de valoriser la mer et d’en tirer des bénéfices, mais de repenser en profondeur notre rapport à elle.

Longtemps structurée autour de grands secteurs historiques, comme la pêche, le transport, ou la construction navale, l’économie maritime française s’ouvre désormais à de nouvelles chaînes de valeur, telles que les énergies renouvelables offshore, les services de surveillance maritime, la gestion des données océanographiques, ou encore les biotechnologies marines. Ces domaines émergents dessinent les contours d’une croissance bleue plus diversifiée, fondée sur l’innovation et la durabilité. Un secteur est aussi concerné, celui du médical, puisque le fond des océans est peuplé d’animaux très utiles pour la recherche scientifique et médicale. Il y a par exemple la limule, dont le sang bleu est utilisé pour les vaccins. De la même manière, de nombreux animaux ou composants peuvent, une fois découverts pour la plupart, faire avancer la science et le monde médical.

Parallèlement, les attentes sociétales évoluent. Le public est de plus en plus sensible à la préservation des océans et à la sobriété des activités maritimes. Cela oblige les entreprises du secteur à revoir leurs pratiques et à intégrer des standards plus exigeants en matière d’impact environnemental. Au-delà d’être économique, la performance doit aussi être écologique et sociale.

Face à ces évolutions, l’État français cherche à affirmer une stratégie plus cohérente et plus ambitieuse. La récente mise à jour de la Stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML 2024-2030) va dans ce sens, tout comme la volonté de mieux articuler les politiques maritimes avec les dynamiques territoriales, notamment dans les outre-mer. Des investissements importants ont été annoncés, mais ils restent souvent fragmentés. Or, une véritable transformation exige de la clarté, de la stabilité réglementaire et un accompagnement massif des transitions.

Le secteur privé, de son côté, multiplie les initiatives. De grands groupes se positionnent sur les technologies bas carbone, les start-up du maritime innovent dans les services numériques, et plusieurs ports français s’engagent dans des projets pilotes de logistique décarbonée. La montée en puissance de l’économie circulaire, notamment dans la gestion des déchets portuaires ou la déconstruction navale, témoigne aussi de cette réorientation.

Reste à savoir si ces signaux forment les premiers jalons d’un changement de cap durable, ou s’ils resteront ponctuels. Car les freins sont nombreux : lourdeurs administratives, manque de visibilité sur les débouchés industriels, compétition étrangère intense, vision politique changeante ou encore complexité des usages maritimes. Le succès d’un nouveau modèle maritime français dépendra de la capacité collective, ce qui inclut les acteurs publics, les entreprises, les territoires, et la société civile, à dépasser ces obstacles pour construire une trajectoire claire et partagée.

La Conférence Océan de l’ONU 2025 permet de mettre les projecteurs sur la mer comme rarement auparavant, ce qui peut marquer un tournant décisif. Pour la France, elle offre l’opportunité de confirmer son engagement, d’incarner une voie ambitieuse et de transformer les ambitions écologiques en moteurs de compétitivité maritime. Encore faut-il que la parole se traduise vraiment en actes.

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