Le courant keynésien ou keynésianisme

 

Image de John Mayard Keynes, fondateur du courant keynésien
Image de John Mayard Keynes, fondateur du courant keynésien

 

Informations principales

Le keynésianisme (ou courant keynésien) est une école de pensée économique qui a été fondée par l’économiste britannique John Maynard Keynes (1883-1946). Celui-ci a une importante influence sur la pensée économique. Son ouvrage le plus important est celui de la « Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie » publié en 1936. Il a tout d’abord étudié les mathématiques, avant de se consacrer ensuite à l’économie. Keynes a participé, à la fin de la Première Guerre mondiale, aux discussions du Traité de Versailles. Il a également proposé lors des débats de Bretton Woods, après la Seconde Guerre mondiale, la création d’une monnaie internationale, qui a finalement été rejetée par les États-Unis.

John Maynard Keynes a principalement développé ses théories à la suite de la crise majeure de 1929 et de la « Grande Dépression » qui l’a suivie jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale.

Il réalise ses travaux en les plaçant en opposition avec ceux des économistes classiques et néo-classiques.

L’idée centrale du keynésianisme est que les marchés qui sont laissés à eux-mêmes ne conduisent pas forcément à l’optimum économique, et donc que l’État a un rôle à jouer dans le domaine économique, afin de pallier les défaillances des marchés. C’est de cette idée dont est notamment venue la politique de relance keynésienne qui vise à soutenir fortement l’économie en cas de crise, grâce à une intervention de l’État et à l’injection de monnaie dans l’économie.

Keynes réfute également la Loi de Say selon laquelle aucune crise de surproduction ne peut être possible. Cependant, dans la logique keynésienne, la crise de 1929 est essentiellement une crise de surproduction, ce qui remet en cause cette loi.

Le keynésianisme a connu plusieurs phases distinctes. En effet, le courant originel de 1936 a donné naissance lors de la décennie suivante au Courant de la Synthèse néo-classique (aussi appelé néokeynésianisme) qui est un mélange de keynésianisme et de néo-classicisme.

Dans les années 1990, la Nouvelle économie keynésienne a émergé en améliorant les raisonnements de la Synthèse néo-classique grâce à l’apport de fondements plus solides. Parallèlement à cette dernière, il existe une autre école, mais plus hétérodoxe et minoritaire, le Post-keynésianisme. Elle se veut plus proche du keynésianisme originel.

 

Un raisonnement macroéconomique

La macroéconomie (en opposition avec la microéconomie) base ses raisonnements sur les comportements économiques collectifs, c’est-à-dire à l’échelle d’un secteur d’activité, d’un pays, ou même du monde. Elle s’intéresse donc aux entités globales.

John Maynard Keynes raisonne en termes d’agrégats nationaux, c’est-à-dire en prenant en compte de grands ensembles économiques. De plus, il raisonne davantage en termes de circuit, que de marché. Par exemple, Keynes cherche comment augmenter le revenu national d’une économie, et non pas comment chaque individu, de manière individuelle, peut augmenter son revenu

Cette vision s’oppose donc à celle des économistes néo-classiques qui basent leurs raisonnements sur la microéconomie et sur l’individuel, plutôt que sur le collectif.

Pour Keynes, l’économie n’est pas seulement la somme des individus qui la composent. Certains comportements économiques peuvent être expliqués parce qu’ils font partie d’un événement plus global. Pour lui, les différents agents économiques prennent des décisions tout en sachant qu’ils appartiennent à un ensemble. Il prend donc beaucoup en compte les comportements collectifs.

De plus, contrairement aux économistes classiques qui pensent que les agents économiques sont rationnels, Keynes pense l’inverse. En effet, pour lui, les agents économiques ne sont pas toujours rationnels. Sur les marchés financiers par exemple, Keynes explique que les achats et les ventes de titres ne se font pas toujours de manière rationnelle. Ces achats et ventes suivent parfois des phénomènes globaux, tel que « l’effet mouton« . Cela signifie que l’achat d’une action n’est pas toujours dirigé par sa rentabilité, mais parce que les autres acheteurs se sont portés acquéreurs de l’action en question.

John Maynard Keynes est considéré comme le fondateur de la macroéconomie moderne.

 

La demande effective, notion importante du courant keynésien

La demande globale qui s’adresse aux entreprises provient à la fois des ménages (ce sont les biens de consommation comme par exemple la nourriture, les voitures, les livres, les meubles, etc) et des entreprises (ce sont les biens de production comme par exemple les machines, les outils, etc).

Tandis que la demande des ménages dépend du niveau des revenus des ménages concernés, la demande des entreprises dépend du niveau d’investissement.

En conséquence, la demande adressée aux entreprises est donc le cumul de la consommation et de l’investissement.

La demande effective, quant à elle, correspond à la demande de biens et de services que les entrepreneurs anticipent. Cette notion de demande effective (aussi appelée demande anticipée) est un concept central dans la pensée keynésienne.

Concrètement, les dirigeants d’entreprise vont estimer ce qu’ils pensent vendre et déterminent à partir de cela le niveau de la production et la quantité de travail qui est nécessaire à cette production. Cela implique que le niveau de la demande effective a des conséquences importantes étant donné qu’il détermine le niveau de la production des entreprises, et par ricochet, le niveau de l’emploi. Keynes considère donc que ce sont bien les entreprises qui déterminent le niveau de l’emploi, et non pas seulement le marché du travail comme peuvent le penser les économistes libéraux (tels que les classiques par exemple).

Les différentes anticipations et prédictions des entrepreneurs vont influencer la santé globale d’une économie. Si les entrepreneurs sont plutôt optimistes, alors ils vont anticiper un niveau élevé de demande effective. À partir de cela, ils vont augmenter le niveau de la production et le niveau de l’emploi.

À contrario, s’ils sont pessimistes, ils vont anticiper un faible niveau de demande effective. Les entrepreneurs vont alors ralentir la production et cela va provoquer une augmentation du chômage.

Cela signifie que le niveau de la demande effective va dépendre, d’une part, du montant des revenus que la population est prête à dépenser pour les biens de consommation, et d’autre part, du montant des investissements pour les biens de production.

Keynes considère que l’État a un rôle à jouer dans l’économie. En effet, il doit soutenir la demande effective afin de résorber le chômage. Pour cela, il peut mettre en place une politique monétaire et une politique budgétaire.

 

Les caractéristiques de la consommation

La notion de propension à consommer est importante dans la logique keynésienne.

La consommation correspond à la part du revenu que les ménages consacrent à l’achat de biens et de services. La propension à consommer correspond donc à la part du revenu qui est consacrée à la consommation.

Selon John Maynard Keynes, il existe une Loi psychologique fondamentale selon laquelle, plus le revenu augmente et plus la part qui est consacrée à la consommation diminue. Un individu qui a des revenus modestes va consacrer l’intégralité de ses revenus à la consommation. À contrario, un individu aisé va pouvoir consacrer une partie de ses revenus à l’épargne. Si les revenus augmentent rapidement, la consommation ne va pas augmenter aussi vite, car une fois un certain seuil atteint, une partie des revenus va plutôt être épargnée.

Cette loi a une extension en la notion de propension marginale à consommer. La propension marginale à consommer correspond à la part d’une unité de revenu supplémentaire qui est consacrée à la consommation. La propension marginale à consommer est donc le rapport entre la variation de la consommation et la variation du revenu.

Selon Keynes, la propension marginale à consommer à tendance à diminuer. En effet, quand un individu voit son revenu augmenter, alors il va augmenter le niveau de sa consommation, mais dans des proportions plus faibles que l’augmentation de son revenu.

 

Les caractéristiques de l’investissement

Les entreprises décident d’investir en fonction du taux de profit qu’elles estiment pouvoir obtenir des investissements qu’elles vont faire, c’est ce qui est appelé les rendements des investissements. La décision d’investir va donc dépendre de l’efficacité de l’investissement et du retour sur investissements. Cela signifie que les investissements les plus efficaces vont être réalisés en premier.

La décision d’investir va dépendre de la comparaison entre le taux de profit de l’investissement et le taux d’intérêt. L’investissement sera effectué si le taux de profit est supérieur au taux d’intérêt. Dans le cas contraire, l’entreprise va préférer placer ses fonds sur les marchés financiers afin de bénéficier des taux d’intérêt.

 

La monnaie selon la théorie développée par le courant keynésien

John Maynard Keynes considère les économies contemporaines comme des économies monétaires. Cela signifie que pour lui, aucun phénomène économique ne peut exister sans prendre en compte la monnaie.

 

La contestation de la Loi de Say, sujet majeur du courant keynésien

Keynes réfute de manière catégorique la Loi des débouchés de l’économiste classique français Jean-Baptiste Say, ainsi que la notion de « voile monétaire » qui en découle. La Loi de Say atteste que l’offre crée sa propre demande. La notion de voile monétaire, quant à elle, stipule que la monnaie n’est qu’un instrument qui facilite les échanges, et donc que cela revient au fait d’échanger des produits contre des produits. Cette loi sous-entend qu’il y a un équilibre global entre l’offre et la demande et qu’il ne peut donc pas y avoir de surproduction. En effet, selon les économistes classiques, le niveau de l’offre est décidé par les entreprises, et la demande est forcément égale à cette offre étant donné qu’elle correspond à la valeur de la production.

À contrario, pour Keynes, l’offre ne crée pas sa propre demande. Pour lui, c’est même le raisonnement inverse. L’offre est bien fixée par les entreprises, mais en fonction du niveau de la demande effective qui est anticipée.

Keynes considère alors que les crises de surproduction sont possibles, ce qui signifie qu’il n’y a pas d’équilibre global entre l’offre et la demande. En effet, si les entreprises se trompent dans leurs anticipations et prédictions, ou si les agents économiques changent leurs comportements une fois les anticipations de demande effective déjà réalisées, il est possible que finalement, l’offre soit supérieure à la demande, ou vice-versa.

En plus de ce raisonnement, Keynes avance que les ménages ne consomment pas la totalité de leurs revenus, une partie de ces derniers est consacrée à l’épargne. La valeur de la production ne peut donc pas être égale à la valeur de la consommation. Pour illustrer ses propos, Keynes prend l’exemple de la crise de 1929 qui est pour lui, une crise de surproduction qui illustre l’incapacité de l’économie à s’autoréguler.

Quand les ménages reçoivent leurs revenus, ils vont décider de la part qu’ils vont allouer à la consommation, et de la part qu’ils vont consacrer à l’épargne. Selon la Loi psychologique fondamentale, le niveau de l’épargne dépend du revenu.

Une fois que les parts sont déterminées, les ménages vont réaliser un arbitrage entre d’une part, conserver leur épargne sous la forme de monnaie (l’épargne monétaire), ou d’autre part, la placer sous la forme de titres financiers (l’épargne financière). 

La part qui est conservée sous la forme de monnaie est appelée la thésaurisation. Le niveau de cette thésaurisation va dépendre du taux d’intérêt sur le marché de la monnaie.

Pour John Maynard Keynes, la monnaie n’est donc pas neutre. En effet, elle peut être demandée pour elle-même.

 

Le marché de la monnaie, de nombreuses fonctions pour les auteurs du courant keynésien 

Le marché monétaire est le lieu sur lequel se rencontrent une offre de monnaie et une demande de monnaie. Le prix de ce marché correspond au taux d’intérêt.

L’offre de monnaie est issue des autorités monétaires (généralement la Banque Centrale, ainsi que le Ministère des Finances si elle n’est pas indépendante) et ce sont donc elles qui déterminent le niveau de la masse monétaire. Cette dernière correspond à la quantité de monnaie qui est en circulation dans une économie. C’est donc le stock de monnaie qui est utilisé par une économie.

Il existe trois motifs majeurs de demande de monnaie. Le motif de transaction est le seul motif de demande de monnaie pour les économistes classiques. En effet, pour eux, la seule raison pour laquelle les agents demandent de la monnaie est pour pouvoir faire et réaliser des transactions.

Les économistes keynésiens quant à eux, ont apporté deux motifs supplémentaires. D’une part, le motif de précaution, et d’autre part le motif de spéculation.

Le motif de précaution consiste à détenir de la monnaie pour se prémunir des risques de la vie, ou pour saisir des opportunités futures. De plus, les agents économiques vont préférer conserver leur argent sous la forme liquide parce qu’ils vont anticiper une hausse des taux d’intérêt, c’est ce que Keynes appelle la préférence pour la liquidité.

Concernant le motif de spéculation, les agents économiques font des arbitrages entre conserver la monnaie ou investir sur les marchés financiers, et ce sont les taux d’intérêt qui leur permettent de réaliser ces arbitrages. Ces taux d’intérêt sont déterminés par la confrontation de l’offre de monnaie et la demande de monnaie. Par conséquent, plus les taux d’intérêt vont être élevés, moins les agents économiques vont demander de la monnaie.

Le taux d’intérêt va donc influencer les agents économiques dans leurs arbitrages entre les placements sur les marchés financiers et l’épargne qu’ils vont garder à portée de main et disponible (la thésaurisation). Ce taux d’intérêt ne concerne que la partie thésaurisée de l’épargne, pas l’épargne globale. Dans la mesure où le taux d’intérêt se constitue par confrontation de l’offre et de la demande de monnaie, cela signifie que si l’offre est supérieure à la demande, alors le taux d’intérêt va diminuer. À contrario, si l’offre est inférieure à la demande, alors le taux d’intérêt va augmenter.

La monnaie peut donc servir d’instrument d’échange, d’instrument de mesure, et également de réserve de valeur.

Le motif de spéculation est celui qui permet d’expliquer la part la plus importante des variations des taux d’intérêt, car la demande de monnaie de transaction et de précaution reste relativement stable dans le temps, le motif de spéculation est beaucoup plus volatil.

 

La politique monétaire keynésienne

Pour John Maynard Keynes, le moteur de la croissance est l’investissement. Cela signifie que l’épargne des ménages doit être placée, pour être dirigée vers les entreprises afin qu’elles puissent financer leurs investissements.

Dans ce raisonnement, le taux d’intérêt a un rôle important puisque les entreprises vont déterminer le niveau de leurs investissements en fonction de ce taux d’intérêt. Si le taux d’intérêt est faible, cela va favoriser l’investissement, puisque les entreprises pourront se procurer de l’argent à moindre coût. Keynes considère donc que la thésaurisation (l’épargne disponible à portée de main et rapidement, car non investie ou prêtée) est un frein à l’économie. Pour lui, c’est de l’argent qui est inactif et qui n’a, par conséquent, aucun rôle dans la croissance économique. Le rôle du taux d’intérêt est primordial dans l’analyse de Keynes.

Les ménages, de leur côté, vont déterminer le niveau de la thésaurisation en fonction du taux d’intérêt. Si le taux d’intérêt est faible, alors la thésaurisation va être faible et les ménages vont préférer placer leur épargne (sur les marchés financiers par exemple).

À partir de ce raisonnement, Keynes va préconiser de mettre en place une politique monétaire qui va favoriser la baisse des taux d’intérêt. Cela implique que les autorités monétaires (la Banque Centrale) doivent augmenter la masse monétaire dans le but de relancer l’économie.

Une hausse de la masse monétaire signifie qu’il va y avoir une augmentation de l’offre de monnaie. Si la demande de monnaie en face reste identique, alors le taux d’intérêt d’équilibre va diminuer. Pour Keynes, le rôle de l’État est alors de soutenir la création monétaire avec le maintien d’un taux d’intérêt faible qui va permettre de favoriser l’investissement, la croissance et par ricochet, l’emploi.

Cependant, pour qu’une politique monétaire expansionniste soit efficace, elle doit respecter deux conditions.

D’une part, l’augmentation de la masse monétaire doit conduire à une baisse du taux d’intérêt. Or, il existe un taux d’intérêt minimal en dessous duquel la demande de monnaie ne peut qu’augmenter. Ce taux plancher correspond à ce que Keynes nomme la « trappe à liquidité« . Cela signifie que les agents économiques vont préférer alors conserver leur épargne sous la forme de monnaie, plutôt que de la placer.

D’autre part, la baisse des taux d’intérêt doit se traduire ensuite par une hausse des investissements. Par rapport à cela, John Maynard Keynes précise que la sensibilité des investissements aux variations du taux d’intérêt est assez faible. Cela sous-entend donc qu’une politique monétaire est indispensable, mais cependant, pas suffisante pour relancer une économie.  

Si le niveau de plein-emploi est déjà atteint, cela signifie qu’une hausse de la monnaie n’aura une incidence que sur l’inflation.

Le soutien de la croissance se fait alors par une politique de relance économique par l’État.

 

La politique économique du courant keynésien

La politique économique keynésienne se fait au travers notamment d’un État-providence qui intervient dans la sphère économique. Cet État doit prendre un certain nombre de mesures afin de soutenir la croissance et l’économie du pays, spécialement en cas de crise.

 

L’État-providence

L’État-providence est une conception de l’intervention de l’État, selon laquelle celui-ci doit jouer un rôle actif dans l’économie du pays. Il doit avoir pour but de rechercher la croissance économique et le progrès social. L’État-providence s’oppose à l’État-gendarme (soutenu par les économistes classiques) qui se concentre sur les missions régaliennes (police et armée notamment), et seulement sur certaines missions d’intérêt général (comme l’éducation).

Dans le cadre de l’État-providence, l’État remplit plusieurs fonctions essentielles pour Keynes.

Tout d’abord, une fonction d’allocation des ressources budgétaires (c’est-à-dire les impôts) dans des dépenses de production collective comme par exemple l’aménagement du territoire, l’éducation, etc.

Ensuite, une fonction de régulation, ce qui signifie de lutter contre les déséquilibres économiques. C’est le cas par exemple de la lutte contre le chômage.

Enfin, une fonction de redistribution dans le but de corriger les inégalités de la répartition primaire des revenus. En effet, Keynes a démontré que la propension à consommer est plus élevée pour les bas salaires, que pour les salaires les plus élevés. Pour lui, il est donc nécessaire de soutenir les salaires les plus bas pour favoriser la consommation.

 

Le chômage selon la conception keynésienne

Selon John Maynard Keynes, le niveau de l’emploi est un phénomène qui est macroéconomique (c’est-à-dire l’étude globale de l’économie à partir de grands agrégats), et non pas microéconomique (c’est-à-dire l’étude des différents agents économiques et leurs comportements).

Pour Keynes, le niveau de l’emploi ne se fixe pas sur le marché du travail, et ne découle donc pas d’une confrontation entre l’offre de travail et la demande de travail, contrairement à ce que pensent les économistes classiques. À l’inverse de ces derniers, Keynes considère qu’une baisse du salaire ne permet pas de diminuer le chômage. C’est même le contraire qui se produit pour lui, une baisse des rémunérations a pour effet de diminuer la demande des ménages, et donc la demande effective.

Le niveau de l’emploi découle, de manière directe, du niveau de la production, qui dépend lui-même de la demande effective. Les entrepreneurs vont décider d’embaucher seulement s’ils décident d’un niveau important de production, donc s’ils anticipent un niveau élevé de demande effective.

Selon Keynes, le chômage peut parfois être involontaire si le niveau de l’emploi qui est nécessaire à la production (décidée par les entreprises) est inférieur au niveau de la population active. En effet, rien ne garantit que le niveau de l’emploi qui est déterminé à travers la demande effective corresponde bien au plein-emploi. Keynes nomme cette situation « l’équilibre de sous-emploi« . Cela signifie que même en dehors de périodes de crise, l’économie peut quand même connaître une situation durable de sous-emploi.

Pour John Maynard Keynes, le chômage est un cercle économique vicieux qui s’auto-entretient. En effet, il ne croit pas en l’autorégulation des marchés, comme le pensent les économistes classiques. Pour lui, il n’y a aucune raison que le niveau de l’emploi qui est décidé par les entreprises en fonction de la demande effective corresponde au plein-emploi.

Le chômage s’auto-entretient, car une baisse de la production provoque des licenciements et une baisse des revenus. Ces derniers événements entraînent une baisse de la consommation, qui engendre à son tour une baisse de la demande effective et amène à une baisse de la production, et ce cycle se reproduit ainsi de suite.

Pour Keynes, une des solutions pour améliorer l’emploi est la relance par la demande grâce à une intervention des pouvoirs publics.

 

La politique de relance keynésienne

Pour Keynes, une politique de relance effectuée par l’État permet de résorber le chômage. Il considère donc que le déficit budgétaire est positif s’il permet de relancer la croissance d’une économie. John Maynard Keynes préconise alors une politique structurelle, mais qui a des effets à court et moyen terme, car il considère “qu’à long terme, nous serons tous morts« .

 

Une relance de l’économie par l’investissement

Keynes soutient notamment une relance par l’investissement. À ce titre, pour lui, l’État doit remplacer les entreprises en matière d’investissement et d’emploi. Cela signifie que l’État doit produire et embaucher lui-même, et cela, à travers notamment une politique productive comme par exemple, une politique de grands travaux.

Le but d’une relance par l’investissement est de provoquer un cercle vertueux de croissance. En effet, une hausse de la production et du niveau de l’emploi amène une hausse du revenu national. Cette hausse provoque une augmentation de la demande de biens de consommation des ménages, et de biens de production des entreprises.

Sur ces résultats, les entrepreneurs vont alors faire des prévisions optimistes et vont constater qu’il y a une hausse de la demande effective. Ils vont, à leur tour, être incités à augmenter le niveau de la production et le niveau de l’emploi pour répondre à cette hausse de la demande. À partir de ce moment-là, les entreprises vont prendre le relais de l’État dans la relance de la croissance. Le déficit budgétaire de l’État qui avait augmenté, va se résorber grâce à l’augmentation des recettes fiscales sur les ménages et les entreprises. Pour Keynes, la relance par l’investissement engendre donc un cercle vertueux de la croissance.

Concrètement, le cercle vertueux keynésien se fait par une hausse du déficit public de la part de l’État qui entraîne une augmentation des investissements et une augmentation de l’emploi.

La hausse des investissements en question amène une hausse de la demande effective, qui entraîne une hausse de la production qui se traduit par une hausse de l’emploi et donc par ricochet, par une hausse des revenus. Cette hausse des revenus entraîne, à son tour, une hausse des recettes fiscales ce qui permet de faire baisser le déficit public. Le cercle vertueux est enclenché.

Ce type de politique économique de relance par l’investissement a notamment été mis en place aux États-Unis à partir de 1933 par le Président Roosevelt pour enrayer les effets de la crise de 1929. L’une des parties de cette politique a été une politique de grands travaux et d’aménagement du territoire (des routes, écoles, barrages, etc). L’objectif était d’employer des chômeurs et de relancer les industries à travers des commandes publiques.

 

L’effet multiplicateur de l’investissement

L’effet multiplicateur de l’investissement est une notion importante de l’analyse keynésienne. En effet, ce concept veut qu’une augmentation de l’investissement entraîne un flux de dépenses qui va se répandre dans l’économie. En se propageant dans l’économie, les dépenses vont donner naissance à des revenus, qui vont être eux aussi dépensés et qui vont à leur tour engendrer un flux successif de demandes supplémentaires.

Par exemple, l’augmentation de l’investissement de 1000 entraîne la distribution de revenus sous la forme de salaires et de bénéfices de 1000. 

Ces revenus vont être en partie consommés, et en partie épargnés. Si la propension moyenne à consommer est de 0,8, cela signifie que la consommation va s’élever à 800, et donc l’épargne à 200. 

La dépense de consommation de 800 va constituer des revenus pour d’autres agents économiques. Ces agents vont dépenser à leur tour ces revenus en fonction de leur propre propension à consommer. Si la propension à consommer est toujours de 0,8, ils vont alors consommer 640 et épargner 160.

Ce mécanisme se répète jusqu’à ce que le dernier revenu soit insignifiant.

Au final, la somme des revenus engendrés par ce procédé est égale au produit du montant de l’investissement initial, ainsi que du coefficient multiplicateur. Cela signifie donc qu’un investissement initial a des effets largement plus que proportionnels sur l’activité économique.

 

La relance par l’imposition

Dans le but de favoriser la consommation, l’État peut, selon Keynes, décider de baisser la fiscalité sur les revenus, au moins dans un premier temps. Une fois que le niveau de la demande effective est suffisant, il peut alors redresser la politique fiscale afin d’obtenir les recettes nécessaires pour combler son déficit budgétaire.

 

La politique de redistribution

Dans le but de soutenir la demande effective, l’État peut, toujours selon Keynes, mettre en place une politique de redistribution. Cela signifie que l’État prélève des revenus chez certains agents économiques pour les transférer à d’autres agents économiques avec pour objectif de réduire les disparités entre les différents agents. Cela correspond par exemple aux allocations chômage, aux allocations familiales, etc.

 

Les limites de la politique de relance keynésienne

L’État-providence prôné par John Maynard Keynes se heurte à plusieurs formes de limites. De plus, sa politique de relance par l’investissement a été très critiquée par les économistes libéraux pour les effets négatifs qu’elle provoque (inflation, déficit public, etc).

Tout d’abord, la politique préconisée par Keynes est forcément plus efficace dans une économie fermée, que dans une économie ouverte. Depuis son raisonnement, l’économie s’est davantage ouverte à l’international, ce qui remet en cause l’efficacité d’une politique de relance. En effet, quand les pays échangent librement, il est possible que la demande se reporte sur des biens étrangers, plutôt que nationaux. Dans ce cas, les importations augmentent et le multiplicateur ne crée plus les effets espérés.

La politique monétaire de Keynes, qui consiste à diminuer les taux d’intérêt dans le but de favoriser l’investissement, peut engendrer une accélération de l’inflation. Cette critique est le principal reproche émis par les économistes monétaristes (qui ont pour chef de file Milton Friedman).

Une autre critique vient du fait qu’une politique budgétaire de ce style engendre un déficit budgétaire qui doit alors être financé par l’État. Cela a pour conséquence d’augmenter le poids de la dette qui va ensuite peser sur les générations suivantes.

L’investissement massif de l’État est susceptible, dans certains cas, de décourager l’investissement privé. Cela est lié au fait que les ménages vont préférer prêter de l’argent à l’État, qui est plus solvable et sûr, qu’aux entreprises privées. C’est ce qui est appelé l’effet d’éviction.

Une autre composante à prendre en compte est celle de l’épargne. En effet, pour qu’une politique de relance soit efficace, il faut que la hausse des revenus engendrée soit allouée à la consommation. Si c’est le niveau de l’épargne qui augmente, et pas celui de la consommation, cela va réduire la demande qui est adressée aux entreprises, et briser le cercle vertueux de la croissance.

Enfin, certains accords régionaux (ou des accords entre certains pays) interdisent aux pays de mener ce type de politique. Cela peut être par exemple pour des raisons financières (maintenir un déficit public raisonnable), commerciales (ne pas créer une forme de concurrence déloyale), politiques, etc.

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